Ce ne sera pas celle là !
Il est déjà assez difficile de dissiper l’écran de fumée municipal sur les politiques existantes sans se lancer en plus dans l’art divinatoire et sans disposer d’éléments techniques et financiers précis pour pouvoir étayer un jugement.
Mais il existe une solution élégante pour répondre aux invitations federbuschiennes : ce qu’on appelle dans l’industrie automobile un « rapport d’étonnement ».
Etonnement numéro 1 :
Loin de moi l'idée de mettre en cause au plan technique le projet « Bolloré », mais je suis fort étonné qu’une entreprise somme toute modeste au plan industriel puisse proposer avant des mastodontes tels que Renault-Nissan ou Peugeot un projet fiable.
Une récente affaire d'espionnage industriel nous rappelle à quel point on se situe dans tous les domaines (batterie, matériaux composites, électronique embarquée) sur du très haut de gamme et de niveau mondial.
Il y faut une « force de frappe » financière, scientifique et industrielle hors du commun et ce n’est pas faire injure au groupe Bolloré que d’être un peu dubitatif sur ses capacités à jouer ainsi dans la cour des grands. Alors on verra.
On verra quelle sera la durée d’autonomie des véhicules, on verra la durée de rechargement des batteries, on verra le taux de rotation des batteries et leur système de recyclage. Et puis on verra tout simplement la fiabilité des véhicules. Des chiffres circulent, ils sont fort surprenants.
Etonnement numéro 2 :
Il est également très surprenant que l’on dispose d’ores et déjà d’un système de localisation satellitaire et d’un système de gestion d’équilibrage des flux entre les stations qui soient à la fois performants et fiables, surtout sur un parc significatif dès le lancement du projet. En vérité, on est dans l'"essuyage de plâtre" à peu près assuré.
Quant au système physique d’équilibrage des véhicules et de réassortiment des stations vides, par « jockeys » - comprendre conducteurs/convoyeurs- il relève à mon avis de la création d’un atelier national. A moins que d’ores et déjà monsieur Delanoë n’ait enterré les 35 heures !!!
Etonnement numéro 3 :
Il n’est pas du tout certain que le réseau EDF parisien puisse supporter aisément sans investissements lourds la puissance électrique nécessaire au rechargement des véhicules.
Etonnement numéro 4 :
Il faut être conscient également que l’on parle de voitures, donc de carrosserie, nous serons dans de la coque plastique, teintée dans la masse. Ce qui signifie qu’au moindre accident, à la moindre rayure, sans qu’on puisse en attribuer les coûts à leurs auteurs puisqu’il n’y aura pas de mise en main contradictoire, il faudra procéder à des échanges standard de pièce en atelier.
J’ai convaincu Serge Federbusch de ne pas parler du vandalisme, du tabagisme, du vol d’accessoires, de la conduite sans permis (sur prêt du véhicule par exemple) ceci dépasserait le cadre de ce rapport d’étonnement.
Etonnement numéro 5 :
Cet étonnement se ramène à un mot : les tarifs. Il n’est évidemment pas question de faire un procès d’intention et j’exclus bien entendu que nous trouvions dans la dialectique du piquet et la chèvre mais espérons que nous ne soyons pas devant un système où l'on crée le besoin et où ensuite l'on infuse des moyens non prévus à l’origine pour assurer l’équilibre du système. Les multiples avenants à Vélib' sont là pour témoigner de cette dérive où Decaux a reçu ex-post de l'argent non prévu initialement. Dès que les médias ne regardent plus ce qui se passe, la vérité des coûts ressurgit discrètement.
Comme le disait plaisamment une de mes amies (madame Khoury, maire adjoint du seizième arrondissement) : "Autolib' a de fortes chances d’être la première voiture électrique avec impôts d’échappement."
Jean Marie « Cassandre » SAUGEY
Le Delanopolis ajoutera un autre étonnement à ce stade : le coût par demi-heure (5 euros outre l'abonnement mensuel de 12 euros) de l'usage d'Autolib' ne paraît pas follement intéressant au regard du simple usage d'un taxi dans de nombreuses configurations. Sachant que prendre un véhicule et le remettre en station consommera du temps alors que les taxis sont partout et vous déposent où vous voulez. Alors, qui aura intérêt à utiliser ce coûteux joujou ?
A suivre ...