Inénarrable exercice de propagande, relayé consciencieusement par la presse le 17 juillet dernier, à l’occasion de l’inauguration par Delanoë d’une auberge de jeunesse sur le bassin de la Villette.
Résumé des faits, selon le maire et ses hagiographes : il y a dix ans, ce quartier était dangereux et moribond. Un des deux bâtiments dits des « Magasins généraux », qui flanquent l’extrémité est du bassin, avait brûlé en 1990. Au même moment, aucune auberge de jeunesse n’avait été inaugurée à Paris. Et l’architecture contemporaine y était méprisée.
Réunissant tous les éléments de ce triste puzzle, l’audacieux Bertrand Delanoë décida qu’une auberge résolument contemporaine y serait construite, offrant à la jeunesse du monde entier un hébergement branché, pacifiant les environs et unissant tous ces publics dans un même élan de créativité. «Abandonné, méprisé" avant son élection, ce site accueille désormais "la beauté" et "la vie", s'est enflammé Delanoë, rapporte l’AFP.
Mais la réalité est, une fois de plus, fort éloignée de cette fiction.
D’abord, les efforts pour réaménager le bassin et ses environs remontent à plus de vingt ans, création d’une ZAC à l’appui, et il faut notamment saluer les mémoires de Michel Fleury pour son rôle dans la sauvegarde de la rotonde de Ledoux ou de Bernard Huet pour la réhabilitation des abords ouest du bassin et la création de la nouvelle place de la Bataille-de-Stalingrad.
Ensuite, le bâtiment de Chaix et Morel, qui vient d’être inauguré, est le dernier état d’un projet initié peu de temps après l’incendie. A l’origine, la ville voulait y loger un lycée spécialisé dans la formation aux métiers du verre et de la construction, avec une architecture audacieuse à l’avenant. L’ingénieur irlandais Peter Rice, qui avait notamment conçu le nuage métallique de la grande arche, la couverture des cours de l’aile Richelieu au Louvre et pris en charge sur le plan technique la construction du Centre Pompidou, se pencha un temps sur le dossier avant son décès prématuré. L’idée d’une structure hôtelière émergea ensuite et la seule inflexion post-2001 a consisté à prévoir une auberge de jeunesse à côté d’un hôtel plus classique.
Delanoë n’a donc fait que prendre le train en marche, comme ce fut le cas au préjudice des mêmes Chaix et Morel pour les travaux du Petit Palais, ces derniers ayant failli être ajournés en 2001 du fait des atermoiements du nouveau maire. On retrouve ainsi la propension delanoesque à s’attribuer les mérites des autres, le modèle du genre ayant été atteint lors de l’inauguration de la passerelle Simone de Beauvoir, dans le 13ème arrondissement.
Examinons maintenant cette question de l’auberge de jeunesse. Parler de la « première inauguration depuis 15 ans » revient à jouer sur les mots. Le groupe St Christopher’s Inns, qui loue les lieux, est une société anglo-saxonne qui s’est spécialisée avec succès dans l’hébergement en dortoirs dans les centres-villes en Europe du Nord, un créneau occupé jusque là en France de manière artisanale par la Fédération unie des auberges de jeunesse ou une multitude de petits hébergeurs privés. Plusieurs « hostels » ont ainsi ouvert leurs portes ces dernières années à Paris, à des tarifs proches de ceux du St Christophers’s.
Ce n’est donc une « première » que du point de vue de la labellisation car l’offre existe déjà et se développe spontanément quoi que lentement.
Par ailleurs, il y a dans le bâtiment reconstruit un hôtel tout ce qu’il y a de plus commercial (Holiday Inn) et un restaurant du même acabit.
Enfin, en matière de pacification du secteur et de ses environs, la triste affaire du jeune Rudy et les luttes entre bandes dans le 19ème arrondissement, du côté de la rue de l’Ourcq, à deux cents mètres de là, devraient inciter Delanoë à davantage de prudence.
Bref, une fois de plus, la mairie est prise la main dans le pot de confiture de la communication. Il suffit juste de prendre la photo au bon moment.
Résumé des faits, selon le maire et ses hagiographes : il y a dix ans, ce quartier était dangereux et moribond. Un des deux bâtiments dits des « Magasins généraux », qui flanquent l’extrémité est du bassin, avait brûlé en 1990. Au même moment, aucune auberge de jeunesse n’avait été inaugurée à Paris. Et l’architecture contemporaine y était méprisée.
Réunissant tous les éléments de ce triste puzzle, l’audacieux Bertrand Delanoë décida qu’une auberge résolument contemporaine y serait construite, offrant à la jeunesse du monde entier un hébergement branché, pacifiant les environs et unissant tous ces publics dans un même élan de créativité. «Abandonné, méprisé" avant son élection, ce site accueille désormais "la beauté" et "la vie", s'est enflammé Delanoë, rapporte l’AFP.
Mais la réalité est, une fois de plus, fort éloignée de cette fiction.
D’abord, les efforts pour réaménager le bassin et ses environs remontent à plus de vingt ans, création d’une ZAC à l’appui, et il faut notamment saluer les mémoires de Michel Fleury pour son rôle dans la sauvegarde de la rotonde de Ledoux ou de Bernard Huet pour la réhabilitation des abords ouest du bassin et la création de la nouvelle place de la Bataille-de-Stalingrad.
Ensuite, le bâtiment de Chaix et Morel, qui vient d’être inauguré, est le dernier état d’un projet initié peu de temps après l’incendie. A l’origine, la ville voulait y loger un lycée spécialisé dans la formation aux métiers du verre et de la construction, avec une architecture audacieuse à l’avenant. L’ingénieur irlandais Peter Rice, qui avait notamment conçu le nuage métallique de la grande arche, la couverture des cours de l’aile Richelieu au Louvre et pris en charge sur le plan technique la construction du Centre Pompidou, se pencha un temps sur le dossier avant son décès prématuré. L’idée d’une structure hôtelière émergea ensuite et la seule inflexion post-2001 a consisté à prévoir une auberge de jeunesse à côté d’un hôtel plus classique.
Delanoë n’a donc fait que prendre le train en marche, comme ce fut le cas au préjudice des mêmes Chaix et Morel pour les travaux du Petit Palais, ces derniers ayant failli être ajournés en 2001 du fait des atermoiements du nouveau maire. On retrouve ainsi la propension delanoesque à s’attribuer les mérites des autres, le modèle du genre ayant été atteint lors de l’inauguration de la passerelle Simone de Beauvoir, dans le 13ème arrondissement.
Examinons maintenant cette question de l’auberge de jeunesse. Parler de la « première inauguration depuis 15 ans » revient à jouer sur les mots. Le groupe St Christopher’s Inns, qui loue les lieux, est une société anglo-saxonne qui s’est spécialisée avec succès dans l’hébergement en dortoirs dans les centres-villes en Europe du Nord, un créneau occupé jusque là en France de manière artisanale par la Fédération unie des auberges de jeunesse ou une multitude de petits hébergeurs privés. Plusieurs « hostels » ont ainsi ouvert leurs portes ces dernières années à Paris, à des tarifs proches de ceux du St Christophers’s.
Ce n’est donc une « première » que du point de vue de la labellisation car l’offre existe déjà et se développe spontanément quoi que lentement.
Par ailleurs, il y a dans le bâtiment reconstruit un hôtel tout ce qu’il y a de plus commercial (Holiday Inn) et un restaurant du même acabit.
Enfin, en matière de pacification du secteur et de ses environs, la triste affaire du jeune Rudy et les luttes entre bandes dans le 19ème arrondissement, du côté de la rue de l’Ourcq, à deux cents mètres de là, devraient inciter Delanoë à davantage de prudence.
Bref, une fois de plus, la mairie est prise la main dans le pot de confiture de la communication. Il suffit juste de prendre la photo au bon moment.