Décidément, Delanoë ne répugne pas aux vieilles recettes. C’est en effet par de sempiternelles « indiscrétions » parues dans Nouvel Obs.fr que la mairie a distillé les premières images de la tour dont elle envisage d’autoriser la construction porte de Versailles (cliquer ici.
A ceux qui n’auraient pas compris que, vu de l’Hôtel de ville, il ne s’agit que de communication, le nom de baptême que le Nouvel Obs tente d’imposer : « Tour Delanoë », devrait faire tomber les écailles des yeux. Nous continuerons en ce qui nous concerne à parler de « Tour des scandales » même si « Tour des embrouilles », « des passe-passe » ou « des passe-droits » feraient aussi bien l’affaire.
Car, autre « révélation » du Nouvel Obs, ô combien significative, les promoteurs, à savoir le groupe Unibail, seraient décidés à inaugurer ce bâtiment d’ici 2012 ! Sachant que le Palais des expositions a fonctionné des décennies sans cet équipement et que nous sommes déjà quasiment en 2009, ces délais relèvent de la précipitation irréaliste si on les croit sincères et du mensonge pur et simple si on n’y croit pas. A moins que l’invocation de 2012 soit une référence à une autre échéance. Laquelle ? A part la tenue d’élections présidentielles, franchement on ne voit pas. Bref, la dimension étroitement publicitaire du projet est, s’agissant d’un Delanoë en campagne, amplement démontrée.
Construire un tel objet en trois ou même quatre ans est en effet une gageure technique et nécessiterait de fouler aux pieds toute règle de concertation sérieuse. Rappelons que la délibération votée par le Conseil de Paris, en juillet dernier, prévoyait, au sujet des hauteurs d’immeubles, le : "lancement d’un processus d’études, de débat et de concertation portant sur l’évolution du paysage urbain parisien». Pour ce qui est du lancement d’études et de débats, ce sera une bouffonnerie, les images et la maquette du projet étant déjà livrées clés-en-mains.
Au passage, deux autres engagements de la mairie sont piétinés pour l’occasion. Celui, émis lors de l’élaboration du PLU par le Conseil de Paris les 24 et 25 novembre 2003, que : « la question des hauteurs et de ses liens avec l’architecture contemporaine fasse l’objet d’un débat démocratique associant les élus, les habitants, les associations, les milieux économiques et les communes riveraines concernées».
Autre trahison, plus grave encore, le texte même du PLU, adopté les 12 et 13 juin 2006, indiquait que, tout « en conservant un plafond des hauteurs inchangé par rapport au précédent règlement d’urbanisme … sur les territoires peu ou mal urbanisés, situés notamment au pourtour de Paris, la Ville encouragera, dans les opérations publiques d’aménagement, l’expression de formes urbaines et architecturales nouvelles afin de poursuivre l’histoire déjà très riche de l’architecture de Paris ».
Or, comme nous l’avons dit dans nos précédents articles sur le sujet, il ne s’agit nullement ici d’une opération publique d’aménagement mais d’une faveur accordée à un promoteur privé. Par une dérogation expresse, il pourrait seul s’affranchir du plafond des hauteurs. Les recettes considérables générées par ce bâtiment n’iraient que dans la poche de ce promoteur et non dans celles de la ville, via une opération publique d’aménagement. C’est une rente de situation -bien peu sociale/libérale- qui lui serait en réalité octroyée.
Revenons maintenant à la dimension urbaine et architecturale de ce projet. Dans ses délibérations précédentes, il était question pour Paris de : « ne pas réaliser des enclaves mais (de) construire des quartiers vivants, en lien avec les quartiers existants, agréables à vivre, urbains, avec la possibilité de quelques immeubles hauts. »
Or, où serions nous ? Dans l’enceinte du Parc des expositions, concédée à un opérateur privé, qui pourra en filtrer l’accès comme il le fait déjà souvent. Cette tour, hormis un vague « musée des langages du monde » serait également privée et réservée de facto à des estivants, festivaliers et conférenciers munis de jolies cartes de crédits. En matière d’enclave, on ne fait pas mieux.
L’implantation de cette tour dans la ville est du reste hautement critiquable. Comme il s’agit de construire sur une parcelle mal faite, effilée et assez étroite, en se pliant aux contraintes d’Unibail, le bâtiment aurait une orientation étrange et formerait comme un énorme paravent posé près du Périphérique (voir ici. Ce serait donc, après ledit Périph et le tramway, une barrière supplémentaire entre Paris et ses alentours. Est -ce par une sorte de malédiction que la plupart des initiatives de Delanoë conduisent à accentuer la césure entre Paris et sa banlieue : tramway, couvercle posé aux Halles sur le RER et ses usagers, tarifs de stationnement discriminatoires pour les non-résidents, etc. ?
Pour faire passer la pilule, le Nouvel Obs entonne l'air connu de la ressemblance avec la "Pyramide de Kheops"! En architecture, dès qu'on veut vendre un bobard, on invoque la figure sempiternelle et consensuelle de la pyramide ...
Vu du 15ème arrondissement, le résultat serait peut-être moins médiocre mais, par sa solitude et l’effet d’encaissement des rues présentes dans son axe, elle créerait à peu près le même choc visuel que la tour Montparnasse vue de la rue de Rennes.
S’agissant de l’aspect extérieur de la tour lui-même, nous n’en dirons guère plus aujourd’hui, dans la mesure où les images présentées sont très peu précises. Les premières réflexions qu’on peut se faire conduisent à penser qu’Herzog et De Meuron ont mieux à leur actif que cet énième immeuble à l’aspect de résille trouée qui devient à l’architecture contemporaine ce que la tarte à la crème est à la pâtisserie. D'autant qu'une fois encore, comme pour la "Canopée des Halles" l'immeuble serait beaucoup moins translucide que ce qui nous est montré.
On paye ici au prix fort l'absence de transparence de la méthode et notamment celle d'un concours international. Quelques caciques d'Unibail se sont arrogés le droit d'imposer leur choix, "dans le plus grand secret" pour un bâtiment qu'on verra de nombreux endroits de Paris. Il va falloir toute la puissance de feu du service de com’ de la mairie et d’Unibail pour faire crier la presse au génie.
Enfin, à ceux qui se désolent de la couardise et du conservatisme parisiens en matière architecturale nous dirons qu’il ne faut pas prendre des vessies pour des lanternes. L’architecture contemporaine mérite mieux qu’un alibi vendu sur papier glacé. Paris peut accueillir des tours d’activité et elles auraient bien davantage de sens urbain à l’entrée de l’avenue Pierre Mendès-France, porte de la Chapelle ou même à Austerlitz et aux Batignolles que dans une enclave commerciale où leur objet ne sera que de maximiser le profit d’un groupe privé sur un emplacement aujourd’hui délaissé.
A ceux qui n’auraient pas compris que, vu de l’Hôtel de ville, il ne s’agit que de communication, le nom de baptême que le Nouvel Obs tente d’imposer : « Tour Delanoë », devrait faire tomber les écailles des yeux. Nous continuerons en ce qui nous concerne à parler de « Tour des scandales » même si « Tour des embrouilles », « des passe-passe » ou « des passe-droits » feraient aussi bien l’affaire.
Car, autre « révélation » du Nouvel Obs, ô combien significative, les promoteurs, à savoir le groupe Unibail, seraient décidés à inaugurer ce bâtiment d’ici 2012 ! Sachant que le Palais des expositions a fonctionné des décennies sans cet équipement et que nous sommes déjà quasiment en 2009, ces délais relèvent de la précipitation irréaliste si on les croit sincères et du mensonge pur et simple si on n’y croit pas. A moins que l’invocation de 2012 soit une référence à une autre échéance. Laquelle ? A part la tenue d’élections présidentielles, franchement on ne voit pas. Bref, la dimension étroitement publicitaire du projet est, s’agissant d’un Delanoë en campagne, amplement démontrée.
Construire un tel objet en trois ou même quatre ans est en effet une gageure technique et nécessiterait de fouler aux pieds toute règle de concertation sérieuse. Rappelons que la délibération votée par le Conseil de Paris, en juillet dernier, prévoyait, au sujet des hauteurs d’immeubles, le : "lancement d’un processus d’études, de débat et de concertation portant sur l’évolution du paysage urbain parisien». Pour ce qui est du lancement d’études et de débats, ce sera une bouffonnerie, les images et la maquette du projet étant déjà livrées clés-en-mains.
Au passage, deux autres engagements de la mairie sont piétinés pour l’occasion. Celui, émis lors de l’élaboration du PLU par le Conseil de Paris les 24 et 25 novembre 2003, que : « la question des hauteurs et de ses liens avec l’architecture contemporaine fasse l’objet d’un débat démocratique associant les élus, les habitants, les associations, les milieux économiques et les communes riveraines concernées».
Autre trahison, plus grave encore, le texte même du PLU, adopté les 12 et 13 juin 2006, indiquait que, tout « en conservant un plafond des hauteurs inchangé par rapport au précédent règlement d’urbanisme … sur les territoires peu ou mal urbanisés, situés notamment au pourtour de Paris, la Ville encouragera, dans les opérations publiques d’aménagement, l’expression de formes urbaines et architecturales nouvelles afin de poursuivre l’histoire déjà très riche de l’architecture de Paris ».
Or, comme nous l’avons dit dans nos précédents articles sur le sujet, il ne s’agit nullement ici d’une opération publique d’aménagement mais d’une faveur accordée à un promoteur privé. Par une dérogation expresse, il pourrait seul s’affranchir du plafond des hauteurs. Les recettes considérables générées par ce bâtiment n’iraient que dans la poche de ce promoteur et non dans celles de la ville, via une opération publique d’aménagement. C’est une rente de situation -bien peu sociale/libérale- qui lui serait en réalité octroyée.
Revenons maintenant à la dimension urbaine et architecturale de ce projet. Dans ses délibérations précédentes, il était question pour Paris de : « ne pas réaliser des enclaves mais (de) construire des quartiers vivants, en lien avec les quartiers existants, agréables à vivre, urbains, avec la possibilité de quelques immeubles hauts. »
Or, où serions nous ? Dans l’enceinte du Parc des expositions, concédée à un opérateur privé, qui pourra en filtrer l’accès comme il le fait déjà souvent. Cette tour, hormis un vague « musée des langages du monde » serait également privée et réservée de facto à des estivants, festivaliers et conférenciers munis de jolies cartes de crédits. En matière d’enclave, on ne fait pas mieux.
L’implantation de cette tour dans la ville est du reste hautement critiquable. Comme il s’agit de construire sur une parcelle mal faite, effilée et assez étroite, en se pliant aux contraintes d’Unibail, le bâtiment aurait une orientation étrange et formerait comme un énorme paravent posé près du Périphérique (voir ici. Ce serait donc, après ledit Périph et le tramway, une barrière supplémentaire entre Paris et ses alentours. Est -ce par une sorte de malédiction que la plupart des initiatives de Delanoë conduisent à accentuer la césure entre Paris et sa banlieue : tramway, couvercle posé aux Halles sur le RER et ses usagers, tarifs de stationnement discriminatoires pour les non-résidents, etc. ?
Pour faire passer la pilule, le Nouvel Obs entonne l'air connu de la ressemblance avec la "Pyramide de Kheops"! En architecture, dès qu'on veut vendre un bobard, on invoque la figure sempiternelle et consensuelle de la pyramide ...
Vu du 15ème arrondissement, le résultat serait peut-être moins médiocre mais, par sa solitude et l’effet d’encaissement des rues présentes dans son axe, elle créerait à peu près le même choc visuel que la tour Montparnasse vue de la rue de Rennes.
S’agissant de l’aspect extérieur de la tour lui-même, nous n’en dirons guère plus aujourd’hui, dans la mesure où les images présentées sont très peu précises. Les premières réflexions qu’on peut se faire conduisent à penser qu’Herzog et De Meuron ont mieux à leur actif que cet énième immeuble à l’aspect de résille trouée qui devient à l’architecture contemporaine ce que la tarte à la crème est à la pâtisserie. D'autant qu'une fois encore, comme pour la "Canopée des Halles" l'immeuble serait beaucoup moins translucide que ce qui nous est montré.
On paye ici au prix fort l'absence de transparence de la méthode et notamment celle d'un concours international. Quelques caciques d'Unibail se sont arrogés le droit d'imposer leur choix, "dans le plus grand secret" pour un bâtiment qu'on verra de nombreux endroits de Paris. Il va falloir toute la puissance de feu du service de com’ de la mairie et d’Unibail pour faire crier la presse au génie.
Enfin, à ceux qui se désolent de la couardise et du conservatisme parisiens en matière architecturale nous dirons qu’il ne faut pas prendre des vessies pour des lanternes. L’architecture contemporaine mérite mieux qu’un alibi vendu sur papier glacé. Paris peut accueillir des tours d’activité et elles auraient bien davantage de sens urbain à l’entrée de l’avenue Pierre Mendès-France, porte de la Chapelle ou même à Austerlitz et aux Batignolles que dans une enclave commerciale où leur objet ne sera que de maximiser le profit d’un groupe privé sur un emplacement aujourd’hui délaissé.