Le Conseil de Paris va examiner la semaine prochaine un rapport remis au mois de juin au maire par la Chambre régionale des comptes d’Ile de France. C’est sûrement pour ne pas gâcher leurs vacances que Bertrand Delanoë a préféré ne pas le transmettre aux conseillers de Paris en juillet car la lecture de ce rapport très dense est édifiante !
Les magistrats financiers ont relevé de multiples irrégularités dans une gestion qui pourtant s’autoproclame pure et vertueuse depuis dix ans.
Le Delanopolis vous en offre un florilège, au fil des trente-neuf pages (les citations du rapport sont en italiques).
D'abord, la Chambre dénonce des « anomalies dans la présentation des documents budgétaires », particulièrement le fait que les dossiers soumis aux élus parisiens ne respectent pas les obligations de l’instruction comptable des communes (M14). Elle constate d’ailleurs que : « la production normative de l’assemblée parisienne ne bénéficie pas d’une publicité qui facilite l’accès à la règle de droit, alors que le Conseil constitutionnel a fait de l’accessibilité du droit une obligation constitutionnelle ».
Autrement dit, alors que Delanoë passe son temps à se présenter comme un champion de la transparence et du respect de la règle de droit, la Chambre des comptes constate qu’il ne suit ni l’instruction comptable de droit commun ni les exigences minimales d’accessibilité des textes votés par le conseil de Paris. Bizarre, bizarre… Remarquez, quand on lit la suite du rapport, on comprend pourquoi il préfère agir dans la pénombre !
A compter de la page 11 du rapport, en effet, s’ouvre un étonnant catalogue d’ « irrégularités dans les créations d’emplois ». Sans prétendre être exhaustif, voici quelques exemples tirés de cette liste.
• « 117 emplois de chargés de mission sont déclarés pourvus alors que leur création n’a pas été autorisée par le conseil de Paris ». Autrement dit, le maire recrute des contractuels sans en informer le conseil. Sa réponse à la Chambre des comptes ne manque pas de sel puisqu’il explique que ces postes sont « gagés » par des postes de fonctionnaires laissés vacants. Il tout de même surprenant pour un membre du parti socialiste, traditionnellement attaché à la défense des fonctionnaires paraît-il, de préférer recruter des agents municipaux sur un statut de contractuel plus précaire que celui de la fonction publique, sans en informer les élus … mais il est vrai que cela permet de s’affranchir de la règle républicaine du concours pour l’accès aux postes de la fonction publique. Pas besoin de vous faire un dessin : Delanoë et sa bande peuvent recruter à tour de bras qui ils veulent !
• « en ce qui concerne les collaborateurs de cabinet, les 132 postes pourvus dépassent le nombre des emplois régulièrement autorisés ». Ce constat incroyable se passe de commentaire : le maire recrute au-delà de ce que les élus parisiens ont permis. A quoi servent ces derniers au fait ?
• « la délibération sur les emplois a été adoptée suivant une procédure irrégulière ». La Chambre régionale des comptes constate ainsi que ce document n’est pas soumis aux instances représentatives du personnel contrairement aux dispositions réglementaires - ce qui dénote une curieuse conception tant du respect de la loi que de celui des représentants des fonctionnaires - et que cette irrégularité a pour effet de fragiliser les actes (notamment les recrutements) résultant de cette délibération. Les recours vont pouvoir se multiplier dès que ces embauchés très spéciaux bénéficieront d'une quelconque mesure individuelle. Mais, pas plus qu'aux élus, la mairie n'avait sans doute pas envie de donner trop d'explications sur le sujet aux syndicats.
• « Bien que la questure du conseil de Paris et ses particularismes aient aujourd’hui disparu, les emplois [de Secrétaire général des services du conseil de Paris, classé en hors échelle E, et de secrétaire général adjoint, classé en hors échelle C, ] ont été maintenus alors que les services du conseil de Paris sont des services administratifs comme les autres. Quand on sait que la « hors échelle lettre E » est celle des plus hauts fonctionnaires, tel le préfet de région Île-de-France, on comprend que la C.R.C. s’interroge sur le décalage opéré, en toute discrétion, entre les discours auto satisfaits sur le retour au droit commun et une pratique surprenante.
Mais ce n'est pas tout, ce n’est pas tout …
Après avoir pointé les irrégularités dans les créations d’emplois, la Chambre régionale des comptes dénonce des « irrégularités dans les recrutements ». Et là encore, on est stupéfait du gouffre entre les discours moralisateurs et vertueux et la pratique constatée. Quelques exemples, tirés des pages 17 et suivantes du rapport.
• « l’examen des conditions de recrutement des membres du cabinet du maire ainsi que de plusieurs directeurs a mis en évidence des irrégularités ou des anomalies au regard des règles de droit, des autorisations budgétaires ou des principes d’organisation des services » !!!!!
• « lorsque le maire recrute pour son cabinet, les fonctionnaires doivent être affectés sur des postes de collaborateurs de cabinet (…) Or l’examen de la gestion des emplois de direction a mis en évidence que ce sont des emplois permanents et non des postes de collaborateurs de cabinet qui ont servi de supports au recrutement ».
Cela a concerné particulièrement le directeur de cabinet, conseiller à la Cour des comptes et la directrice adjoint de cabinet. Soulignons le courage des magistrats de la chambre régionale qui révèlent qu’un de leurs collègues est dans une situation clairement critiquable. Notons au passage qu’il ne s’agit pas d’un débat de théoriciens sur le sexe des anges. Il y a un enjeu financier lourd : le fait d’avoir été recruté non comme un collaborateur de cabinet mais comme un secrétaire général adjoint a permis à l’intéressé de percevoir des éléments de rémunération auxquels il n’aurait pas pu prétendre autrement dont une « prime départementale » d’un montant de 30 000€ (cf. p18 et p27 du rapport). Le rapport ne précise pas si l’attribution d’une bonification indiciaire de 180 points attachée théoriquement à l’emploi de secrétaire général adjoint a été effectuée.
• « des directeurs généraux sans direction générale » : comme le souligne le rapport, « dans la réalité, le management des directions relève non de directeurs généraux mais de quatre secrétaires généraux adjoints » et « dans l’organigramme, il n’y a pas de direction générale mais seulement des directions. Il ne devrait pas y avoir d’emplois de directeurs généraux mais seulement des emplois de directeurs ». La C.R.C. chiffre à 1,8M€ le coût annuel de cette anomalie qui permet d'arroser des obligés. Notons au passage que Delanoë, ce soi-disant bon gestionnaire qui récupère l'argent des Parisiens dans le dossier Chirac, dépense illégalement, à ce seul titre et chaque année, les quatre cinquièmes de ce que l'ancien président et l'UMP vont verser pour une période de plus de 10 ans.
• « directeurs adjoints recrutés sans emplois budgétaires correspondants ». Cette situation concerne 10 fonctionnaires recrutés « alors que cet emploi n’est pas un emploi budgétaire » mais qui bénéficient de compléments indemnitaires particuliers.
• la CRC constate que la mairie a créé des emplois de délégué ou délégué général. La liste laisse plus que perplexe puisque la ville de Paris s’est dotée notamment d’un délégué à l’enseignement supérieur de la musique et de la danse, d’un délégué à l’art moderne et contemporain (on ne sait pas s’il est compétent pour les questions de sécurité au musée d’art moderne !), d’un délégué à la communication interne ou encore d’une déléguée générale au design… et l’inventaire à la Prévert pourrait se poursuivre car il y a apparemment huit délégués au total. Des très hauts fonctionnaires pour des emplois qui prêtent à sourire.
Or, les magistrats de la CRC constatent que : « ne remplissant aucunement des fonctions de directeur général ou de directeur, ces agents ont été nommés dans des conditions irrégulières, les trois fonctionnaires détachés sur un emploi de directeur général étant, de plus, rémunérés en dépassement de l’autorisation donnée par le conseil de Paris, qui plafonne le traitement des délégués à la hors échelle C ». On n’aura pas la cruauté de demander immédiatement le bilan d’activité de ces délégués, rémunérés tout de même pour certains pour un coût supérieur à 200 000€ (sur la base des chiffres présentés p 18 du rapport : le coût salarial 2008 des 20 directeurs généraux qui ont atteint la hors échelle lettre E a été de 4 961 359 €, soit 248 000€ en moyenne).
Mais il serait intéressant d’obtenir des éléments concrets et vérifiables (rapports, notes de services comptes-rendus de réunions, etc.) pour apprécier la réalité de leur action. Il serait particulièrement horrible, pour le "monsieur lave-plus-blanc" de l'Hôtel de ville, que leur rôle soit tellement fantomatique qu'on puisse parler d'emplois fictifs. Pourvu qu'il s'agisse uniquement d'emplois inutiles !
La Chambre relève diverses autres irrégularités dans la gestion de la paie. Parmi celles-ci, relevons :
• le « dépassement du seuil mensuel maximum d’heures supplémentaires dans les services culturels et sociaux notamment ». MM. Girard et Delanoë en contravention avec la réglementation sur les heures supplémentaires, cela est incroyable : ce type de constat quand il concerne des entreprises privées conduit fréquemment leurs patrons à être qualifié par certains politiciens de « patrons voyous ». En l’espèce, il y a un seuil qu’il ne faut sûrement pas franchir mais ce constat est dérangeant et rejoint bien des articles du syndicat SUPAP.
• la Chambre des comptes critique l’attribution de 180 points de « NBI » au Secrétaire général de la Ville, ce qui correspond au niveau du préfet de la région Ile de France mais est tout de même 50% de plus que ses homologues du conseil régional d’Ile de France et des mairies de Lyon et de Marseille. « L’utilisation discutable de la référence aux emplois d’administration centrale pour fixer la NBI des personnels de direction entraîne un avantage indû pour les bénéficiaires et un surcoût pour les finances communales ».
• une même irrégularité frappe le régime indemnitaire des personnels informatiques (NBI et primes). Cela est d’autant plus frappant que la même Chambre régionale avait fait un rapport très critique sur l’inefficacité de la politique informatique de la ville il y a quelques mois seulement (rapport transmis au maire de Paris le 7 octobre 2009).
• la CRC critique fortement la dénaturation opérée depuis 2003 dans l’attribution d’une prime départementale. A sa création, en 1991, ce dispositif coûtait 0,18M€ ; en 2002, il coûtait 5M€ ; en 2009, il est passé à 13M€, soit un quasi triplement en sept ans. Cela résulte de l’extension du nombre de bénéficiaires, ce qui est présenté par la mairie comme une mesure de justice sociale ; cela résulte aussi fondamentalement des fortes hausses décidées au bénéfice de l’encadrement très supérieur : la prime du secrétaire général était de 33 000€ en 2002, elle est passée à 38 000€ en 2003 et est actuellement de 40 000€. Quant à la justice sociale, la chambre souligne que « l’amplitude s’agissant des attributions effectives est de 1 à 1 333, allant de 30€ à 40 000€ ». C'est beau, c'est égalitaire le socialisme municipal parisien !
Dans sa réponse à ce rapport féroce, le maire de Paris se contente d’expliquer soit qu’il a pris des mesures de transparence pour remédier aux errements existants avant son arrivée (il omet tout de même de préciser qu’il est maire depuis bientôt dix ans et que l’héritage est un argument désormais éculé) soit, en termes généraux, que la chambre des comptes se trompe dans son analyse (on l’a connu plus prompt à souligner le respect dû aux rapports des magistrats des comptes mais il est vrai qu’ils concernaient d’autres que lui).
En revanche, aucune réponse sur les points ponctuels, sur la rémunération de ses collaborateurs directs, directeur de cabinet, secrétaire général, directeurs généraux ou non, délégués généraux ou non, etc. Ah si : s’agissant du directeur de cabinet, la réplique ne manque pas de saveur : « en ce qui concerne le directeur de cabinet du Maire, le choix a été fait en 2001 de reprendre le dispositif appliqué aux précédents directeurs de cabinet". C’est bien : on apprend ainsi qu’il y avait au moins une chose qui n’était pas à jeter aux orties quand la lumière est arrivée à l’Hôtel de Ville !!!
Mais le meilleur de la communication delanoesque se déploie pour expliquer très sérieusement, citation tronquée à l’appui, que la Chambre lui donne acte de sa volonté de maîtrise des dépenses de personnel et du fait qu’elles sont en moyenne dix points inférieures à celles des autres communes.
La réalité, tant du rapport que des chiffres disponibles par ailleurs est autrement moins favorable : la CRC constate en effet la hausse très importante des dépenses de personnel. Depuis 2001, elles ont augmenté de 23, 03%, constatent les magistrats qui écrivent (et cette citation là n’omet pas la moitié de la phrase du rapport !!!) : « Si la part des charges de personnel dans les dépenses de gestion (41,4%) est, en moyenne encore inférieure de 10 points aux autres communes (51,6%), le rythme d’évolution de ces dépenses a, au cours de la même période, été plus rapide que celui des recettes de fonctionnement (+1,93 point) et que celui des recettes de gestion courante »(p9/39). Il faut d’ailleurs savoir que quand B.Delanoë a été élu maire, l’audit des finances qu’il avait commandité avait constaté que la part des dépenses de personnel était limitée à 36% des dépenses de gestion.
Le plus préoccupant pour les contribuables parisiens est que cette très forte augmentation est structurellement et nettement supérieure à celle des recettes de gestion courante : c’est là qu’il faut chercher la vraie cause des hausses massives d’impôts des deux dernières années dont il vous suffira de cliquer ici pour retrouver l'analyse détaillée.
Reste évidemment une question fondamentale : qui sont les petits privilégiés qui ont bénéficié de toutes ces largesses ? Le Delanopolis vous avez déjà tenu au courant, il y a un an, du sort heureux d'un trader recruté par la ville ( voir en cliquant ici), ou de celui d'un inspecteur bien sous tous rapports ( voir en cliquant là). Mais il y en a d'autres.
En attendant, il serait indispensable qu'un audit approfondi des politiques conduites depuis 2001 et de leurs conséquences financières soit mené par des cabinets indépendants. Après son élection, Delanoë l'avait demandé. Presque 10 ans plus tard, il est manifestement urgent de le réactualiser.
Les magistrats financiers ont relevé de multiples irrégularités dans une gestion qui pourtant s’autoproclame pure et vertueuse depuis dix ans.
Le Delanopolis vous en offre un florilège, au fil des trente-neuf pages (les citations du rapport sont en italiques).
D'abord, la Chambre dénonce des « anomalies dans la présentation des documents budgétaires », particulièrement le fait que les dossiers soumis aux élus parisiens ne respectent pas les obligations de l’instruction comptable des communes (M14). Elle constate d’ailleurs que : « la production normative de l’assemblée parisienne ne bénéficie pas d’une publicité qui facilite l’accès à la règle de droit, alors que le Conseil constitutionnel a fait de l’accessibilité du droit une obligation constitutionnelle ».
Autrement dit, alors que Delanoë passe son temps à se présenter comme un champion de la transparence et du respect de la règle de droit, la Chambre des comptes constate qu’il ne suit ni l’instruction comptable de droit commun ni les exigences minimales d’accessibilité des textes votés par le conseil de Paris. Bizarre, bizarre… Remarquez, quand on lit la suite du rapport, on comprend pourquoi il préfère agir dans la pénombre !
A compter de la page 11 du rapport, en effet, s’ouvre un étonnant catalogue d’ « irrégularités dans les créations d’emplois ». Sans prétendre être exhaustif, voici quelques exemples tirés de cette liste.
• « 117 emplois de chargés de mission sont déclarés pourvus alors que leur création n’a pas été autorisée par le conseil de Paris ». Autrement dit, le maire recrute des contractuels sans en informer le conseil. Sa réponse à la Chambre des comptes ne manque pas de sel puisqu’il explique que ces postes sont « gagés » par des postes de fonctionnaires laissés vacants. Il tout de même surprenant pour un membre du parti socialiste, traditionnellement attaché à la défense des fonctionnaires paraît-il, de préférer recruter des agents municipaux sur un statut de contractuel plus précaire que celui de la fonction publique, sans en informer les élus … mais il est vrai que cela permet de s’affranchir de la règle républicaine du concours pour l’accès aux postes de la fonction publique. Pas besoin de vous faire un dessin : Delanoë et sa bande peuvent recruter à tour de bras qui ils veulent !
• « en ce qui concerne les collaborateurs de cabinet, les 132 postes pourvus dépassent le nombre des emplois régulièrement autorisés ». Ce constat incroyable se passe de commentaire : le maire recrute au-delà de ce que les élus parisiens ont permis. A quoi servent ces derniers au fait ?
• « la délibération sur les emplois a été adoptée suivant une procédure irrégulière ». La Chambre régionale des comptes constate ainsi que ce document n’est pas soumis aux instances représentatives du personnel contrairement aux dispositions réglementaires - ce qui dénote une curieuse conception tant du respect de la loi que de celui des représentants des fonctionnaires - et que cette irrégularité a pour effet de fragiliser les actes (notamment les recrutements) résultant de cette délibération. Les recours vont pouvoir se multiplier dès que ces embauchés très spéciaux bénéficieront d'une quelconque mesure individuelle. Mais, pas plus qu'aux élus, la mairie n'avait sans doute pas envie de donner trop d'explications sur le sujet aux syndicats.
• « Bien que la questure du conseil de Paris et ses particularismes aient aujourd’hui disparu, les emplois [de Secrétaire général des services du conseil de Paris, classé en hors échelle E, et de secrétaire général adjoint, classé en hors échelle C, ] ont été maintenus alors que les services du conseil de Paris sont des services administratifs comme les autres. Quand on sait que la « hors échelle lettre E » est celle des plus hauts fonctionnaires, tel le préfet de région Île-de-France, on comprend que la C.R.C. s’interroge sur le décalage opéré, en toute discrétion, entre les discours auto satisfaits sur le retour au droit commun et une pratique surprenante.
Mais ce n'est pas tout, ce n’est pas tout …
Après avoir pointé les irrégularités dans les créations d’emplois, la Chambre régionale des comptes dénonce des « irrégularités dans les recrutements ». Et là encore, on est stupéfait du gouffre entre les discours moralisateurs et vertueux et la pratique constatée. Quelques exemples, tirés des pages 17 et suivantes du rapport.
• « l’examen des conditions de recrutement des membres du cabinet du maire ainsi que de plusieurs directeurs a mis en évidence des irrégularités ou des anomalies au regard des règles de droit, des autorisations budgétaires ou des principes d’organisation des services » !!!!!
• « lorsque le maire recrute pour son cabinet, les fonctionnaires doivent être affectés sur des postes de collaborateurs de cabinet (…) Or l’examen de la gestion des emplois de direction a mis en évidence que ce sont des emplois permanents et non des postes de collaborateurs de cabinet qui ont servi de supports au recrutement ».
Cela a concerné particulièrement le directeur de cabinet, conseiller à la Cour des comptes et la directrice adjoint de cabinet. Soulignons le courage des magistrats de la chambre régionale qui révèlent qu’un de leurs collègues est dans une situation clairement critiquable. Notons au passage qu’il ne s’agit pas d’un débat de théoriciens sur le sexe des anges. Il y a un enjeu financier lourd : le fait d’avoir été recruté non comme un collaborateur de cabinet mais comme un secrétaire général adjoint a permis à l’intéressé de percevoir des éléments de rémunération auxquels il n’aurait pas pu prétendre autrement dont une « prime départementale » d’un montant de 30 000€ (cf. p18 et p27 du rapport). Le rapport ne précise pas si l’attribution d’une bonification indiciaire de 180 points attachée théoriquement à l’emploi de secrétaire général adjoint a été effectuée.
• « des directeurs généraux sans direction générale » : comme le souligne le rapport, « dans la réalité, le management des directions relève non de directeurs généraux mais de quatre secrétaires généraux adjoints » et « dans l’organigramme, il n’y a pas de direction générale mais seulement des directions. Il ne devrait pas y avoir d’emplois de directeurs généraux mais seulement des emplois de directeurs ». La C.R.C. chiffre à 1,8M€ le coût annuel de cette anomalie qui permet d'arroser des obligés. Notons au passage que Delanoë, ce soi-disant bon gestionnaire qui récupère l'argent des Parisiens dans le dossier Chirac, dépense illégalement, à ce seul titre et chaque année, les quatre cinquièmes de ce que l'ancien président et l'UMP vont verser pour une période de plus de 10 ans.
• « directeurs adjoints recrutés sans emplois budgétaires correspondants ». Cette situation concerne 10 fonctionnaires recrutés « alors que cet emploi n’est pas un emploi budgétaire » mais qui bénéficient de compléments indemnitaires particuliers.
• la CRC constate que la mairie a créé des emplois de délégué ou délégué général. La liste laisse plus que perplexe puisque la ville de Paris s’est dotée notamment d’un délégué à l’enseignement supérieur de la musique et de la danse, d’un délégué à l’art moderne et contemporain (on ne sait pas s’il est compétent pour les questions de sécurité au musée d’art moderne !), d’un délégué à la communication interne ou encore d’une déléguée générale au design… et l’inventaire à la Prévert pourrait se poursuivre car il y a apparemment huit délégués au total. Des très hauts fonctionnaires pour des emplois qui prêtent à sourire.
Or, les magistrats de la CRC constatent que : « ne remplissant aucunement des fonctions de directeur général ou de directeur, ces agents ont été nommés dans des conditions irrégulières, les trois fonctionnaires détachés sur un emploi de directeur général étant, de plus, rémunérés en dépassement de l’autorisation donnée par le conseil de Paris, qui plafonne le traitement des délégués à la hors échelle C ». On n’aura pas la cruauté de demander immédiatement le bilan d’activité de ces délégués, rémunérés tout de même pour certains pour un coût supérieur à 200 000€ (sur la base des chiffres présentés p 18 du rapport : le coût salarial 2008 des 20 directeurs généraux qui ont atteint la hors échelle lettre E a été de 4 961 359 €, soit 248 000€ en moyenne).
Mais il serait intéressant d’obtenir des éléments concrets et vérifiables (rapports, notes de services comptes-rendus de réunions, etc.) pour apprécier la réalité de leur action. Il serait particulièrement horrible, pour le "monsieur lave-plus-blanc" de l'Hôtel de ville, que leur rôle soit tellement fantomatique qu'on puisse parler d'emplois fictifs. Pourvu qu'il s'agisse uniquement d'emplois inutiles !
La Chambre relève diverses autres irrégularités dans la gestion de la paie. Parmi celles-ci, relevons :
• le « dépassement du seuil mensuel maximum d’heures supplémentaires dans les services culturels et sociaux notamment ». MM. Girard et Delanoë en contravention avec la réglementation sur les heures supplémentaires, cela est incroyable : ce type de constat quand il concerne des entreprises privées conduit fréquemment leurs patrons à être qualifié par certains politiciens de « patrons voyous ». En l’espèce, il y a un seuil qu’il ne faut sûrement pas franchir mais ce constat est dérangeant et rejoint bien des articles du syndicat SUPAP.
• la Chambre des comptes critique l’attribution de 180 points de « NBI » au Secrétaire général de la Ville, ce qui correspond au niveau du préfet de la région Ile de France mais est tout de même 50% de plus que ses homologues du conseil régional d’Ile de France et des mairies de Lyon et de Marseille. « L’utilisation discutable de la référence aux emplois d’administration centrale pour fixer la NBI des personnels de direction entraîne un avantage indû pour les bénéficiaires et un surcoût pour les finances communales ».
• une même irrégularité frappe le régime indemnitaire des personnels informatiques (NBI et primes). Cela est d’autant plus frappant que la même Chambre régionale avait fait un rapport très critique sur l’inefficacité de la politique informatique de la ville il y a quelques mois seulement (rapport transmis au maire de Paris le 7 octobre 2009).
• la CRC critique fortement la dénaturation opérée depuis 2003 dans l’attribution d’une prime départementale. A sa création, en 1991, ce dispositif coûtait 0,18M€ ; en 2002, il coûtait 5M€ ; en 2009, il est passé à 13M€, soit un quasi triplement en sept ans. Cela résulte de l’extension du nombre de bénéficiaires, ce qui est présenté par la mairie comme une mesure de justice sociale ; cela résulte aussi fondamentalement des fortes hausses décidées au bénéfice de l’encadrement très supérieur : la prime du secrétaire général était de 33 000€ en 2002, elle est passée à 38 000€ en 2003 et est actuellement de 40 000€. Quant à la justice sociale, la chambre souligne que « l’amplitude s’agissant des attributions effectives est de 1 à 1 333, allant de 30€ à 40 000€ ». C'est beau, c'est égalitaire le socialisme municipal parisien !
Dans sa réponse à ce rapport féroce, le maire de Paris se contente d’expliquer soit qu’il a pris des mesures de transparence pour remédier aux errements existants avant son arrivée (il omet tout de même de préciser qu’il est maire depuis bientôt dix ans et que l’héritage est un argument désormais éculé) soit, en termes généraux, que la chambre des comptes se trompe dans son analyse (on l’a connu plus prompt à souligner le respect dû aux rapports des magistrats des comptes mais il est vrai qu’ils concernaient d’autres que lui).
En revanche, aucune réponse sur les points ponctuels, sur la rémunération de ses collaborateurs directs, directeur de cabinet, secrétaire général, directeurs généraux ou non, délégués généraux ou non, etc. Ah si : s’agissant du directeur de cabinet, la réplique ne manque pas de saveur : « en ce qui concerne le directeur de cabinet du Maire, le choix a été fait en 2001 de reprendre le dispositif appliqué aux précédents directeurs de cabinet". C’est bien : on apprend ainsi qu’il y avait au moins une chose qui n’était pas à jeter aux orties quand la lumière est arrivée à l’Hôtel de Ville !!!
Mais le meilleur de la communication delanoesque se déploie pour expliquer très sérieusement, citation tronquée à l’appui, que la Chambre lui donne acte de sa volonté de maîtrise des dépenses de personnel et du fait qu’elles sont en moyenne dix points inférieures à celles des autres communes.
La réalité, tant du rapport que des chiffres disponibles par ailleurs est autrement moins favorable : la CRC constate en effet la hausse très importante des dépenses de personnel. Depuis 2001, elles ont augmenté de 23, 03%, constatent les magistrats qui écrivent (et cette citation là n’omet pas la moitié de la phrase du rapport !!!) : « Si la part des charges de personnel dans les dépenses de gestion (41,4%) est, en moyenne encore inférieure de 10 points aux autres communes (51,6%), le rythme d’évolution de ces dépenses a, au cours de la même période, été plus rapide que celui des recettes de fonctionnement (+1,93 point) et que celui des recettes de gestion courante »(p9/39). Il faut d’ailleurs savoir que quand B.Delanoë a été élu maire, l’audit des finances qu’il avait commandité avait constaté que la part des dépenses de personnel était limitée à 36% des dépenses de gestion.
Le plus préoccupant pour les contribuables parisiens est que cette très forte augmentation est structurellement et nettement supérieure à celle des recettes de gestion courante : c’est là qu’il faut chercher la vraie cause des hausses massives d’impôts des deux dernières années dont il vous suffira de cliquer ici pour retrouver l'analyse détaillée.
Reste évidemment une question fondamentale : qui sont les petits privilégiés qui ont bénéficié de toutes ces largesses ? Le Delanopolis vous avez déjà tenu au courant, il y a un an, du sort heureux d'un trader recruté par la ville ( voir en cliquant ici), ou de celui d'un inspecteur bien sous tous rapports ( voir en cliquant là). Mais il y en a d'autres.
En attendant, il serait indispensable qu'un audit approfondi des politiques conduites depuis 2001 et de leurs conséquences financières soit mené par des cabinets indépendants. Après son élection, Delanoë l'avait demandé. Presque 10 ans plus tard, il est manifestement urgent de le réactualiser.