Fin 2003, la ville de Paris se félicite bruyamment d’un succès : elle a racheté l’ancien cinéma Louxor, à l’angle des boulevards Barbès et de Magenta, pour une somme présentée comme raisonnable (autour de deux millions d’euros) et va en faire un centre dédié au cinéma et aux musiques nouvelles du « Sud ».
Mi 2008, des palissades immondes encerclent toujours les lieux et la fière banderole (encore une, c’est une manie !) annonçant le lancement de l’opération est sérieusement défraîchie. La mairie serait-elle victime d’une malédiction des pharaons ?
On peut le craindre, et les contribuables parisiens avec elle, quand on sait que le prochain conseil de Paris s’apprête à voter des travaux proprement pharaoniques ayant un coût de 26 millions d’euros. Treize fois le prix d’acquisition ! Et encore, il ne s’agit que d’une prévision.
Que s’est-il donc passé pour que rien ne se passe et que l’hyperinflation menace ? Quand on pose la question aux élus en charge du dossier, on apprend que le bâtiment était plus délabré qu’ils ne le croyaient et que des carrières en sous-sol rendent une restauration lourde indispensable. Voilà donc la mairie de Paris découvrant soudain qu’il y a des carrières dans le sol de sa ville … Ce que tous les habitants des contreforts de Montmartre savent peu ou prou et que le corps des mines, chargé des carrières parisiennes, inventorie et relève depuis des siècles.
La réalité est simple : la municipalité s’est lancée avec la plus totale légèreté dans cette opération et la dérive tourne à la gabegie. Les seuls marchés de prestations intellectuelles que le Conseil de Paris va bientôt voter s’élèvent à 1, 3 million d’euros, essentiellement pour étudier la sécurité, le fonctionnement et la maintenance de l’édifice. Cinq ans après l’acquisition, il va être fait appel à une assistance à maîtrise d’ouvrage « du fait de la complexité de l’opération », alors qu’il existe une direction entière comportant plusieurs centaines d’employés pour faire ce type de travail à la mairie. Imaginez que vous avez acheté un appartement 200.000 euros. Puis qu’il vous faille payer 2.500.000 euros de travaux et 160.000 euros d’audit de sécurité : vous avez désormais une idée des dégâts.
A toutes les objections et les interrogations posées en conseil d’arrondissement, une seule réponse est donnée : c’est le maire de Paris qui le veut. A presque 30 millions d’euros chacune, il vaudrait mieux que Delanoë n’ait pas trop de lubies. Et dire qu’il essaie de vendre à l’opinion publique une image de bon gestionnaire. Pourvu que cela ne se sache pas en province et que de méchants ségolistes ne l’ébruitent pas …
Reste une question essentielle : à quoi tout cela sert-il ? Plus précisément : en quoi va consister ce fameux « centre du cinéma et des musiques nouvelles du Sud » ? C’est ici que le dossier du Louxor tourne à l’aberration. Dans la même délibération, il est dit en effet que : « l’évolution du projet est aujourd’hui orientée vers l’objectif suivant … créer un cinéma de quartier de qualité type art et essai … »
Près de 30 millions d’euros pour retaper un cinéma de quartier, le record mondial est pulvérisé !
Quant à la programmation de ce « centre de cinéma et musiques du Sud » et nonobstant cinéma de quartier, on reste perplexe devant les explications données. Il n’y aurait pas, nous jure-t-on, de lieu dédié à ce fameux « Sud » à Paris. Vraiment ? Mettons bout à bout les festivals organisés par la cinémathèque française (le dernier sur le cinéma africain –Africamania- s’est achevé en avril 2008), l’auditorium du musée du Quai Branly, les rétrospectives de Beaubourg, l’action des ambassades étrangères et l’offre privée. La couverture de cette création est déjà très large dans notre ville et sans doute la meilleure au monde. D’autant qu’une réalité est manifestement ignorée par les promoteurs de ce projet : la production cinématographique africaine, cœur de cible avoué, est encore faible. On pressent déjà des séances passablement désertées.
En vérité, la ville s’est lancée dans cette opération sur une tocade de son maire, sans idée claire de son coût et de ses objectifs. Et l’addition sera encore plus salée qu’il n’est avoué aujourd’hui. Le saucissonnage des missions va notamment faire vivre un calvaire au futur architecte maître d’œuvre qui devra composer avec des gens arrivés avant lui. Ce pilotage à multiples commandes rallongera les délais. Mais il fallait que Delanoë puisse annoncer, en 2003, qu’il avait sauvé le Louxor.
Enfin … tout n’est pas négatif dans cette histoire. Les archéologues qui ont fouillé les sous-sols du Louxor viennent en effet de faire une découverte fantastique, un pharaon parisien jusque là ignoré. Son nom : « Tout-En-Com ». Prière de ne pas lui ôter ses bandelettes, il pourrait se réveiller.
Mi 2008, des palissades immondes encerclent toujours les lieux et la fière banderole (encore une, c’est une manie !) annonçant le lancement de l’opération est sérieusement défraîchie. La mairie serait-elle victime d’une malédiction des pharaons ?
On peut le craindre, et les contribuables parisiens avec elle, quand on sait que le prochain conseil de Paris s’apprête à voter des travaux proprement pharaoniques ayant un coût de 26 millions d’euros. Treize fois le prix d’acquisition ! Et encore, il ne s’agit que d’une prévision.
Que s’est-il donc passé pour que rien ne se passe et que l’hyperinflation menace ? Quand on pose la question aux élus en charge du dossier, on apprend que le bâtiment était plus délabré qu’ils ne le croyaient et que des carrières en sous-sol rendent une restauration lourde indispensable. Voilà donc la mairie de Paris découvrant soudain qu’il y a des carrières dans le sol de sa ville … Ce que tous les habitants des contreforts de Montmartre savent peu ou prou et que le corps des mines, chargé des carrières parisiennes, inventorie et relève depuis des siècles.
La réalité est simple : la municipalité s’est lancée avec la plus totale légèreté dans cette opération et la dérive tourne à la gabegie. Les seuls marchés de prestations intellectuelles que le Conseil de Paris va bientôt voter s’élèvent à 1, 3 million d’euros, essentiellement pour étudier la sécurité, le fonctionnement et la maintenance de l’édifice. Cinq ans après l’acquisition, il va être fait appel à une assistance à maîtrise d’ouvrage « du fait de la complexité de l’opération », alors qu’il existe une direction entière comportant plusieurs centaines d’employés pour faire ce type de travail à la mairie. Imaginez que vous avez acheté un appartement 200.000 euros. Puis qu’il vous faille payer 2.500.000 euros de travaux et 160.000 euros d’audit de sécurité : vous avez désormais une idée des dégâts.
A toutes les objections et les interrogations posées en conseil d’arrondissement, une seule réponse est donnée : c’est le maire de Paris qui le veut. A presque 30 millions d’euros chacune, il vaudrait mieux que Delanoë n’ait pas trop de lubies. Et dire qu’il essaie de vendre à l’opinion publique une image de bon gestionnaire. Pourvu que cela ne se sache pas en province et que de méchants ségolistes ne l’ébruitent pas …
Reste une question essentielle : à quoi tout cela sert-il ? Plus précisément : en quoi va consister ce fameux « centre du cinéma et des musiques nouvelles du Sud » ? C’est ici que le dossier du Louxor tourne à l’aberration. Dans la même délibération, il est dit en effet que : « l’évolution du projet est aujourd’hui orientée vers l’objectif suivant … créer un cinéma de quartier de qualité type art et essai … »
Près de 30 millions d’euros pour retaper un cinéma de quartier, le record mondial est pulvérisé !
Quant à la programmation de ce « centre de cinéma et musiques du Sud » et nonobstant cinéma de quartier, on reste perplexe devant les explications données. Il n’y aurait pas, nous jure-t-on, de lieu dédié à ce fameux « Sud » à Paris. Vraiment ? Mettons bout à bout les festivals organisés par la cinémathèque française (le dernier sur le cinéma africain –Africamania- s’est achevé en avril 2008), l’auditorium du musée du Quai Branly, les rétrospectives de Beaubourg, l’action des ambassades étrangères et l’offre privée. La couverture de cette création est déjà très large dans notre ville et sans doute la meilleure au monde. D’autant qu’une réalité est manifestement ignorée par les promoteurs de ce projet : la production cinématographique africaine, cœur de cible avoué, est encore faible. On pressent déjà des séances passablement désertées.
En vérité, la ville s’est lancée dans cette opération sur une tocade de son maire, sans idée claire de son coût et de ses objectifs. Et l’addition sera encore plus salée qu’il n’est avoué aujourd’hui. Le saucissonnage des missions va notamment faire vivre un calvaire au futur architecte maître d’œuvre qui devra composer avec des gens arrivés avant lui. Ce pilotage à multiples commandes rallongera les délais. Mais il fallait que Delanoë puisse annoncer, en 2003, qu’il avait sauvé le Louxor.
Enfin … tout n’est pas négatif dans cette histoire. Les archéologues qui ont fouillé les sous-sols du Louxor viennent en effet de faire une découverte fantastique, un pharaon parisien jusque là ignoré. Son nom : « Tout-En-Com ». Prière de ne pas lui ôter ses bandelettes, il pourrait se réveiller.