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Le salaire du trader



Encore une révélation du Delanopolis !

Pour recruter un nouveau directeur des achats autrefois "trader", la ville a tordu le cou aux règles de la fonction publique. Une dérive qui illustre la multiplication des emplois, notamment de direction, et l'explosion des coûts de personnel à Paris, alors que les contribuables y sont assommés de taxes nouvelles.



Le salaire du trader
Rappelons nous d'abord une bien belle formule contenue dans un ouvrage paru en 1999 sous la plume d'un certain Bertrand D. Pour l'honneur de Paris, ce dernier fustigeait une municipalité qui prenait, selon lui, ses aises avec le droit : " il s’agit ici de décrypter ce système, pour mieux comprendre la culture politique qui l’engendre. A la base de celle-ci, un principe : le respect de la loi est facultatif ». Bien dit !

Quoi que ... ce mouvement de menton est un peu oublié aujourd'hui car, dans la torpeur de l’été, le même B. Delanoë, devenu maire, a fait adopter dans l’indifférence générale une curieuse disposition créant un « directeur des achats à la mairie de Paris ».

Cette noble initiative avait pour objet est de « garantir une bonne utilisation des deniers publics (…) dans des conditions optimales de qualité de prestation, de délai et de prix » (sic). Qui ne souscrirait à pareille ambition ? Les quelques sites internet indépendants, tel Delanopolis ou Bakchich info, qui ont été quasiment les seuls à soulever le lièvre de l’affaire de l’attribution de certains marchés d’ordures ménagères ( cliquez ici) ne peuvent qu’applaudir à tout effort tendant à « garantir une bonne utilisation des deniers publics ».

Posons pourtant la première question qui fâche : à quoi bon ce vote ? Car, même sans cette délibération, il était possible d’améliorer les conditions de la commande publique à Paris. Les réorganisations sont le pain quotidien des gestionnaires, publics ou privés. Et, normalement, elles n’impliquent pas de création de postes. Les textes existants permettaient de mettre en place cette direction des achats et il n’était nul besoin de prévoir, par un vote particulier, un emploi spécifique. Les cadres d’emploi de la mairie de Paris prévoient déjà des directeurs, responsables de services non moins importants que les achats, tels que le directeur des affaires juridiques, celui des finances ou encore celui des ressources humaines.

Plus incompréhensible encore : il y a déjà, à la ville de Paris, une « direction des achats, de la logistique, des implantations administratives », placée nécessairement entre de bonnes mains puisque dirigée par un ancien conseiller budgétaire du maire ! Vraiment, on se demande pourquoi, dans ces conditions, il était si urgent de créer cette fonction de directeur des achats ...

Et bien, chers lecteurs, ne cherchez plus. Sur ce poste bien spécifique, il fallait absolument nommer un employé un peu particulier : un chef de bureau contractuel officiant à la ville. Avant d' y atterrir, ce dernier avait longuement travaillé dans les salles de marché d’une grande banque française, la Société générale, bien connue pour les brillantes performances de ses traders (c.f. un certain Jérôme Kerviel). Ce n'était d'ailleurs pas son seul mérite : la qualité du travail de ce gestionnaire hors pair de la dette de la ville de Paris devait être saluée car, depuis son recrutement comme contractuel, cet endettement a quasiment doublé.

Pourtant, quitte à le faire passer directement du rang de chef de bureau contractuel à celui de directeur - tous les fonctionnaires apprécieront la caractère météorique de cette promotion ! -, pourquoi ne pas utiliser les postes existants ?

Est-ce parce qu’une telle promotion express d’un contractuel, sur des emplois théoriquement réservés à des fonctionnaires, aurait fait tousser le contrôle de légalité de la préfecture ? Est-ce parce que, à force de nommer deux directeurs par direction, situation sans équivalent dans l’administration française et ruineuse pour les Parisiens, il n’y avait plus de poste disponible ? Est-ce tout simplement parce que le traitement d’un « simple » directeur n’était pas au niveau de celle d’un ex-trader ? Car le poste ainsi créé prévoit une rémunération calculée « dans une fourchette ayant pour minimum le groupe hors échelle A et pour maximum le groupe hors échelle E (…) ». Traduit en français, cela signifie que la rémunération mensuelle de l’intéressé doit être de l’ordre de 11 à 12 000 € nets mensuels primes comprises. Pas mal, non, pour le directeur des achats d’une collectivité locale, encore simple chef de bureau il y a quelques semaines …

Il serait également intéressant de savoir si la direction des ressources humaines de la ville, en charge de ce délicat dossier, n’a formulé aucune observation quant à sa légalité. Car l’article 3 de la loi de janvier 1984 relative à la fonction publique territoriale pose comme principe que les collectivités territoriales ne peuvent recruter des agents non titulaires pour occuper des emplois permanents.

Certes, par dérogation à ce principe, « des emplois permanents peuvent être occupés par des agents contractuels dans les cas suivants : 1° Lorsqu'il n'existe pas de cadre d'emplois de fonctionnaires susceptibles d'assurer les fonctions correspondantes ; 2° Pour les emplois du niveau de la catégorie A, lorsque la nature des fonctions ou les besoins des services le justifient. ». Mais la spécificité de la fonction de directeur des achats, qui existait déjà à la ville de Paris et existe dans la plupart des grandes administrations, est assumée par des fonctionnaires ayant passé des concours, voie d’accès normale à l’administration.

Très clairement, la création de cet emploi fonctionnel ne correspond donc à aucun des deux cas de dérogation prévus par la loi de 1984. Et l'ex-directeur des ressources humaines de la ville jusqu'en juillet dernier ne pourra répondre aux interrogations car, quelques semaines seulement après le vote de cette délibération, il est parti !

De toute façon, pour postuler, il fallait justifier « d’une expérience avérée dans le domaine financier et de l’achat ». Admirable coïncidence ... Pourquoi, en effet, dans le domaine financier ? Etre un familier des salles de marché ne donne certainement pas des aptitudes particulières à la passation des marchés publics. Bref, l'emploi était taillé sur mesure.

Comme dirait un auteur oublié : " le respect de la loi perd toujours à devenir facultatif". Et pendant ce temps les Parisiens payent.






Mardi 6 Octobre 2009
Serge Federbusch






1.Posté par christian15e le 12/10/2009 21:15
Bien sûr, l'aspect légal et juridique doivent être soulevés , mais pourquoi ne pas aller droit au but : un "copain " à placer....

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