D'abord et avant tout, partez à la rencontre d'un jeune homme qui bouleversa le monde, qu'aucun roi, aucun empereur, aucune armée ne purent vaincre mais qui mourut, si l'on en croit la légende, après que son singe de compagnie l'ait infecté par une vilaine morsure. Alexandre fut son nom et grand fut son prestige. L'exposition du Louvre est magnifique. D'abord par sa scénographie conçue avec brio par Brigitte Fryland et le très talentueux architecte Marc Barani. Mais surtout par les époustouflantes trouvailles archéologiques, faites parfois ces dernières décennies et qui nous ont livré quelques vases, statuettes de terre cuite, verres et bijoux en or d'une beauté stupéfiante et d'un état de conservation exceptionnel. Mentions spéciales à des objets petits par la taille mais insignes par la qualité comme une coupe en verre miraculeusement intacte et qui pourrait en remontrer aux plus belles créations de l'Art déco par sa simplicité même, une figuration de danseur et un vase qui a conservé sa polychromie d'origine presque intacte. Le relatif isolement de la Macédoine lui a évité les pillages et les fouilles intempestives qui ont tant nui aux sites plus connus et prestigieux du Péloponnèse. Pourtant, la puissance de cette terre grecque et sa richesse, qui lui permettaient de recruter les meilleurs artisans de son époque, éclatent de tout leur faste rue de Rivoli, 25 siècles plus tard. On ressort de là en se disant que les péripéties actuelles à base de dettes et de bureaucraties seront plus vite oubliées que cette magnifique culture.
En matière de contamination, le film que Soderbergh fait sortir sur les écrans est assez déroutant. On pourrait croire qu'il s'agit d'un travail fait sur la commande de l'OMS, tant son principe comme son élaboration sont quasi-cliniques et viennent illustrer de manière la plus réaliste possible, imagine-t-on, ce qui se passerait en cas de virus H1N1 ou équivalent qui, cette fois, serait vraiment méchant. Une centaine de millions de morts plus tard, l'Humanité reprend son chemin. Paradoxalement, du simple point de vue technique, le propos aurait gagné à être plus romancé, en évitant de multiplier les personnages qui finissent pour certains par devenir anecdotiques jusqu'au ridicule, sort malheureusement réservée à notre Cotillard nationale.
Si l'on reste dans les salles obscures, on regardera d'un oeil distrait "Killer Elite", milliardième resucée du film de tueurs oeuvrant à la lisière des services secrets pour la bonne cause. Difficile de l'avouer aux quelques intellos qui liront ces lignes mais le cabotinage de Jason Statham nous plaît bien, mieux en tout cas que celui de De Niro qui devrait raccrocher, c'est sûr. Sinon, on notera que l'action, située au début des années 1980, offre une intéressante reconstitution d'un passé encore très proche mais qui, déjà, se démarque de notre quotidien, ne fût-ce que par l'absence de téléphones portables.
Plus surprenant est "The sleeping beauty", oeuvre de Julia Leigh, cinéaste australienne encore novice qui jouit des qualités et pâtit des défauts de sa relative inexpérience. Son héroïne, étudiante devant multiplier les petits boulots, incarne l'exploitation de la jeunesse néo-prolétaire d'aujourd'hui. Comme elle n'est ni bégueule ni contrariante, elle dit oui à tout, à tous ceux qui veulent la sauter et à celles qui lui proposent des emplois sulfureux de soubrettes dans des dîners arrosés et dénudés. C'est une sorte de "120 jours de Sodome" vu du point de vue des esclaves plutôt que de celui des maîtres et cela eût pu constituer un prolongement intéressant à ce que fit naguère Pasolini. Mais l'expérience fait défaut à la mise en scène qui n'offre qu'une vision caricaturale des grands bourgeois décadents et ne parvient à mettre dans la bouche de ses héros et vilains que des phrases convenues ou vides de sens. Dommage, mais nous nous rendrons avec intérêt à son prochain film.
Si l'on revient maintenant aux arts plastiques, les mordus d'Asie apprécieront la petite exposition sur les manuscrits birmans dans la bibliothèque de Guimet, avec leurs calligraphies cubisantes. Par ailleurs, même ceux qui ne sont pas fanatiques d'Extrême-Orient ne pourront rester insensibles aux richesses des estampes japonaises de l'Ukiyo-e présentées à la Maison de la culture du Japon. L'originalité de cette collection tient d'abord à sa provenance : un diplomate grec qui engloutit tout son argent, à la fin du 19ème siècle, pour se constituer un vaste rassemblement d'oeuvres asiatiques. Le tout forme aujourd'hui un musée à Corfou et cela donne envie de s'y rendre. Les grands maîtres de l'estampe sont tous présents et si l'on en arrive à une conclusion, c'est bien celle qu'Hokusaï fut le plus grand dessinateur et l'un des plus importants artistes de l'Histoire. Tant de virtuosité graphique, tant de liberté de ton, tant d'originalité d'approche, tant de profusion ! Une oeuvre colossale qui n'est d'ailleurs presentée que pour une faible part. Le grand mérite de cette exposition est en tout cas d'offrir un panorama vaste et riche d'un art trop reproduit pour être vraiment connu.
Un dernier mot pour les dessins de Vasari au Louvre. Le 500 ème anniversaire de sa naissance permet au musée de puiser dans son fonds graphique dont la richesse est quasi-insondable, comme en témoigne ce qu'il est capable de montrer de cet artiste dont la production est pourtant assez rare et souvent occultée par son travail sur les maîtres de la Renaissance. Intéressant.
Bonnes visites !
En matière de contamination, le film que Soderbergh fait sortir sur les écrans est assez déroutant. On pourrait croire qu'il s'agit d'un travail fait sur la commande de l'OMS, tant son principe comme son élaboration sont quasi-cliniques et viennent illustrer de manière la plus réaliste possible, imagine-t-on, ce qui se passerait en cas de virus H1N1 ou équivalent qui, cette fois, serait vraiment méchant. Une centaine de millions de morts plus tard, l'Humanité reprend son chemin. Paradoxalement, du simple point de vue technique, le propos aurait gagné à être plus romancé, en évitant de multiplier les personnages qui finissent pour certains par devenir anecdotiques jusqu'au ridicule, sort malheureusement réservée à notre Cotillard nationale.
Si l'on reste dans les salles obscures, on regardera d'un oeil distrait "Killer Elite", milliardième resucée du film de tueurs oeuvrant à la lisière des services secrets pour la bonne cause. Difficile de l'avouer aux quelques intellos qui liront ces lignes mais le cabotinage de Jason Statham nous plaît bien, mieux en tout cas que celui de De Niro qui devrait raccrocher, c'est sûr. Sinon, on notera que l'action, située au début des années 1980, offre une intéressante reconstitution d'un passé encore très proche mais qui, déjà, se démarque de notre quotidien, ne fût-ce que par l'absence de téléphones portables.
Plus surprenant est "The sleeping beauty", oeuvre de Julia Leigh, cinéaste australienne encore novice qui jouit des qualités et pâtit des défauts de sa relative inexpérience. Son héroïne, étudiante devant multiplier les petits boulots, incarne l'exploitation de la jeunesse néo-prolétaire d'aujourd'hui. Comme elle n'est ni bégueule ni contrariante, elle dit oui à tout, à tous ceux qui veulent la sauter et à celles qui lui proposent des emplois sulfureux de soubrettes dans des dîners arrosés et dénudés. C'est une sorte de "120 jours de Sodome" vu du point de vue des esclaves plutôt que de celui des maîtres et cela eût pu constituer un prolongement intéressant à ce que fit naguère Pasolini. Mais l'expérience fait défaut à la mise en scène qui n'offre qu'une vision caricaturale des grands bourgeois décadents et ne parvient à mettre dans la bouche de ses héros et vilains que des phrases convenues ou vides de sens. Dommage, mais nous nous rendrons avec intérêt à son prochain film.
Si l'on revient maintenant aux arts plastiques, les mordus d'Asie apprécieront la petite exposition sur les manuscrits birmans dans la bibliothèque de Guimet, avec leurs calligraphies cubisantes. Par ailleurs, même ceux qui ne sont pas fanatiques d'Extrême-Orient ne pourront rester insensibles aux richesses des estampes japonaises de l'Ukiyo-e présentées à la Maison de la culture du Japon. L'originalité de cette collection tient d'abord à sa provenance : un diplomate grec qui engloutit tout son argent, à la fin du 19ème siècle, pour se constituer un vaste rassemblement d'oeuvres asiatiques. Le tout forme aujourd'hui un musée à Corfou et cela donne envie de s'y rendre. Les grands maîtres de l'estampe sont tous présents et si l'on en arrive à une conclusion, c'est bien celle qu'Hokusaï fut le plus grand dessinateur et l'un des plus importants artistes de l'Histoire. Tant de virtuosité graphique, tant de liberté de ton, tant d'originalité d'approche, tant de profusion ! Une oeuvre colossale qui n'est d'ailleurs presentée que pour une faible part. Le grand mérite de cette exposition est en tout cas d'offrir un panorama vaste et riche d'un art trop reproduit pour être vraiment connu.
Un dernier mot pour les dessins de Vasari au Louvre. Le 500 ème anniversaire de sa naissance permet au musée de puiser dans son fonds graphique dont la richesse est quasi-insondable, comme en témoigne ce qu'il est capable de montrer de cet artiste dont la production est pourtant assez rare et souvent occultée par son travail sur les maîtres de la Renaissance. Intéressant.
Bonnes visites !