Q : Comment éviter que l’union sacrée se traduise par un gel de la pensée ? Un conseiller ministériel proche du pouvoir évoquait dans le Monde sa crainte d’un délitement.
R : L’union sacrée ne durera guère plus longtemps qu’un rassemblement place de la République avant qu’éclate le premier pétard. Certes, la droite et le FN, par tactique, ne taperont pas immédiatement sur le pouvoir. Mais le grand escamotage réussi avec la complicité de la plupart des médias après les crimes de janvier dernier ne pourra fonctionner une nouvelle fois.
Je suis frappé par l’immensité des réactions d’hostilité que les apparitions et déclarations d’Hollande provoquent sur les réseaux sociaux. Sa responsabilité est clairement mise en cause : comment de tels carnages ont été possibles dix mois après ? Pourquoi continuer dans le préchi précha du «pas d’amalgame» ? La communication gouvernementale met l’accent sur l’origine étrangère du problème, sur Daech. Mais il est de plus en plus difficile d’éviter la question qui fâche : ces éléments criminels sont-ils des électrons importés ou l’avant-garde encore très minoritaire certes mais en plein essor d’une partie de la population française qui rejette les valeurs de liberté et veut imposer la Sharia ?
Manifestement, les éléments de langage en cas de nouvel attentat étaient prêts. Cela explique l’annonce quasi-immédiate par Hollande de l’état de siège, des jours de deuil national ou de la soi-disant fermeture des frontières. Mais le président a vendu la mèche en reprenant cette dernière expression alors qu’il ne peut s’agir d’une vraie fermeture : comment isoler notre pays du reste du monde ? Il voulait dire «contrôle aux frontières» mais il a oublié, dans sa panique, que c’était déjà le cas depuis l’annonce récente de telles mesures en raison de la COP 21. Bref, face au désastre, Hollande a hoqueté un discours prévu d’avance puis a tourné les talons et laissé la foule dans le stade de France. Tout cela a un caractère artificiel et déconnecté de la réalité : les Français ne sont aucunement rassurés et n’ont pas le sentiment que le pouvoir contrôle la situation. Ils ont raison. Il règne dans le pays une atmosphère d’hébétude et d’incompréhension malsaine.
Q : La vie politique française a-t-elle basculé dans une ère nouvelle, quelle parole peut combler le déficit de pensée des partis sur les grands enjeux géopolitiques ou civilisationnels trop souvent remplacés par des débats déconnectés du réel ?
R : La question de l’intégration de la population musulmane dans le reste de la communauté française devient le problème le plus important auquel nous sommes confrontés. Cela occulte le sujet plus déterminant encore de notre déclin économique dû à l’interaction délétère de la bureaucratie domestique et de la technocratie européenne. Les partis dits de gouvernement passent leur temps à feinter. Les responsables du PS ont réussi à parler des meurtres de ces derniers jours sans employer une seule fois le mot «islam». Il n’est guère étonnant dans ces conditions que le FN ait le seul discours audible, à défaut d’être convaincant notamment sur les sujets économiques.
Q : Le préchi-précha et la culture du déni cumulée à celle de l’excuse sur les questions d’intégration de populations d’origine étrangère ne se reconnaissant pas dans les valeurs françaises peut-il continuer à figurer largement dans la parole publique ?
R : Comme les socialistes et leurs satellites n’ont pas de discours de substitution, ils vont devoir s’y accrocher. Mais la machine tourne à vide. Aux prochains attentats, qui ne sauraient tarder, ils ne pourront que bredouiller. Car quelle est la triste réalité ? Hollande s’est trompé deux fois.
D’une part en engageant la France dans le guêpier syrien sans avoir mûri au préalable ses buts de guerre. Pour vaincre Daech, il faut cesser d’écouter les universitaires fumeux qui font les délices de Mediapart, accepter de s’allier aux Russes et aux Kurdes et se résigner à différer l’élimination d’Assad. Puis il faut engager des hommes par milliers sur le terrain. Si l’on n’est pas prêt à payer ce prix, il ne faut pas aller jouer au mariole avec quelques bombardiers et un porte-avion pour faire de la com’ et se donner un sentiment de puissance hélas fugace.
D’autre part, Hollande a fauté gravement en reculant devant les fondamentalistes en France. Ces derniers se délectent de nos faiblesses et recrutent grâce à elles. Les voiles prolifèrent depuis janvier, dans une attitude de défi bravache. Il aurait fallu les interdire depuis belle lurette à l’université et dans les édifices publics, fermer les mosquées radicales, expulser les prêcheurs, couper le robinet des aides et allocations et même dénoncer la convention européenne des droits de l’homme pour ne la re-ratifier qu’avec des réserves sur le regroupement familial. La triste réalité, que la gauche ne veut pas voir, est qu’une part croissante des musulmans français se constitue en communauté dissidente rejetant les valeurs républicaines. Elle bénéficie d’un dynamisme démographique qui va rendre le problème majeur d’ici dix ans. C’est dur à admettre mais c’est ainsi. Il suffit de lire les témoignages recueillis par l’historien et enseignant Georges Bensoussan dans les banlieues. Tel est le terreau de la radicalisation. Les tueurs de Daech en sont directement issus.
Q : On a vu après Charlie Hebdo que la simple évocation -ou l’incantation- des valeurs de la République ne rassemblaient pas nécessairement toute la société française, au-delà du deuil et de l’émotion, quelles sont les valeurs qui peuvent vraiment, efficacement rassembler la nation ?
R : D’abord, sans vouloir sombrer dans un post-marxisme mécaniste, il est probable que les choses iraient mieux si nous retrouvions la croissance économique. Certains égarés qui envisagent le djihad trouveraient du travail puis le sain chemin des bars et des boîtes de nuit. Hélas, comme je l’ai écrit vainement depuis des années, il faudrait pour cela plus de libéralisme en interne et plus de souveraineté vis-à-vis de Bruxelles : un cocktail étonnant mais seul à même de nous redonner du tonus. Ensuite, il faudrait réaffirmer sans complexe les valeurs républicaines. Je n’y croyais pas au départ, mais le salut aux couleurs le matin dans les lycées et les collèges serait une bonne chose. Il faut que les jeunes soient fiers d’être français. Ils ont besoin de ressentir des émotions collectives.
Q : Assistons-nous à l’apparition de quelque chose de nouveau dans le discours politique avec des propos radicaux comme ceux de Philippe de Villiers qui dès vendredi soir parlait de mosquéisation de la France ou Laurent Wauquiez qui demande l’internement des 4000 personnes signalées dans les fichiers anti-terroristes ? S’agit-il de dérapages ou d’une stratégie assumée de personnes évoluant dans la galaxie de Patrick Buisson, “Vous cherchez la guerre civile, vous l’aurez (là où la société française dans son ensemble est plutôt résiliente)”, le sous entendu étant nous n’avons pas peur d’avoir à en passer par la violence pour se débarrasser du cancer islamiste?
R : Il ne faut pas s’étonner que la radicalisation entraîne la radicalisation, elle est faite pour cela. Cela étant, le Daechistan bien de chez nous, qui joue la politique du pire, commet une grosse erreur. Pour le moment, les Français sont encore léthargiques pour avoir trop consommé l’opium des intellectuels de gauche. Mais l’islam est et restera un corpus idéologique et une pratique sociale très minoritaire et rejetée par une part écrasante des Français. Or, il est de la nature des parts écrasantes de finir par écraser celles qui ne le sont pas quand ces dernières deviennent des gros problèmes.
Q : Quel est le risque de voir apparaître des gens misant sur la politique du pire pour déclencher une crise violente qui permettrait de précipiter le régime autoritaire qu’ils se cachent à peine de souhaiter (cf livre de Villiers) ?
R : Le risque est réel en effet. La France n’a ni la compacité géographique ni l’homogénéité sociale d’Israël. Face à des attentats récurrents, massifs et imprévisibles, elle finira par réagir plus violemment et indistinctement que ne le fait l’Etat hébreu. Cela ne passerait pas forcément du reste par un Etat autoritaire. La triste réalité d’une situation hors de contrôle ressemblerait plutôt à celle de la Saint Barthélémy : des massacres perpétrés avec la bienveillance du pouvoir par des groupes se réclamant de l’auto-défense.
R : L’union sacrée ne durera guère plus longtemps qu’un rassemblement place de la République avant qu’éclate le premier pétard. Certes, la droite et le FN, par tactique, ne taperont pas immédiatement sur le pouvoir. Mais le grand escamotage réussi avec la complicité de la plupart des médias après les crimes de janvier dernier ne pourra fonctionner une nouvelle fois.
Je suis frappé par l’immensité des réactions d’hostilité que les apparitions et déclarations d’Hollande provoquent sur les réseaux sociaux. Sa responsabilité est clairement mise en cause : comment de tels carnages ont été possibles dix mois après ? Pourquoi continuer dans le préchi précha du «pas d’amalgame» ? La communication gouvernementale met l’accent sur l’origine étrangère du problème, sur Daech. Mais il est de plus en plus difficile d’éviter la question qui fâche : ces éléments criminels sont-ils des électrons importés ou l’avant-garde encore très minoritaire certes mais en plein essor d’une partie de la population française qui rejette les valeurs de liberté et veut imposer la Sharia ?
Manifestement, les éléments de langage en cas de nouvel attentat étaient prêts. Cela explique l’annonce quasi-immédiate par Hollande de l’état de siège, des jours de deuil national ou de la soi-disant fermeture des frontières. Mais le président a vendu la mèche en reprenant cette dernière expression alors qu’il ne peut s’agir d’une vraie fermeture : comment isoler notre pays du reste du monde ? Il voulait dire «contrôle aux frontières» mais il a oublié, dans sa panique, que c’était déjà le cas depuis l’annonce récente de telles mesures en raison de la COP 21. Bref, face au désastre, Hollande a hoqueté un discours prévu d’avance puis a tourné les talons et laissé la foule dans le stade de France. Tout cela a un caractère artificiel et déconnecté de la réalité : les Français ne sont aucunement rassurés et n’ont pas le sentiment que le pouvoir contrôle la situation. Ils ont raison. Il règne dans le pays une atmosphère d’hébétude et d’incompréhension malsaine.
Q : La vie politique française a-t-elle basculé dans une ère nouvelle, quelle parole peut combler le déficit de pensée des partis sur les grands enjeux géopolitiques ou civilisationnels trop souvent remplacés par des débats déconnectés du réel ?
R : La question de l’intégration de la population musulmane dans le reste de la communauté française devient le problème le plus important auquel nous sommes confrontés. Cela occulte le sujet plus déterminant encore de notre déclin économique dû à l’interaction délétère de la bureaucratie domestique et de la technocratie européenne. Les partis dits de gouvernement passent leur temps à feinter. Les responsables du PS ont réussi à parler des meurtres de ces derniers jours sans employer une seule fois le mot «islam». Il n’est guère étonnant dans ces conditions que le FN ait le seul discours audible, à défaut d’être convaincant notamment sur les sujets économiques.
Q : Le préchi-précha et la culture du déni cumulée à celle de l’excuse sur les questions d’intégration de populations d’origine étrangère ne se reconnaissant pas dans les valeurs françaises peut-il continuer à figurer largement dans la parole publique ?
R : Comme les socialistes et leurs satellites n’ont pas de discours de substitution, ils vont devoir s’y accrocher. Mais la machine tourne à vide. Aux prochains attentats, qui ne sauraient tarder, ils ne pourront que bredouiller. Car quelle est la triste réalité ? Hollande s’est trompé deux fois.
D’une part en engageant la France dans le guêpier syrien sans avoir mûri au préalable ses buts de guerre. Pour vaincre Daech, il faut cesser d’écouter les universitaires fumeux qui font les délices de Mediapart, accepter de s’allier aux Russes et aux Kurdes et se résigner à différer l’élimination d’Assad. Puis il faut engager des hommes par milliers sur le terrain. Si l’on n’est pas prêt à payer ce prix, il ne faut pas aller jouer au mariole avec quelques bombardiers et un porte-avion pour faire de la com’ et se donner un sentiment de puissance hélas fugace.
D’autre part, Hollande a fauté gravement en reculant devant les fondamentalistes en France. Ces derniers se délectent de nos faiblesses et recrutent grâce à elles. Les voiles prolifèrent depuis janvier, dans une attitude de défi bravache. Il aurait fallu les interdire depuis belle lurette à l’université et dans les édifices publics, fermer les mosquées radicales, expulser les prêcheurs, couper le robinet des aides et allocations et même dénoncer la convention européenne des droits de l’homme pour ne la re-ratifier qu’avec des réserves sur le regroupement familial. La triste réalité, que la gauche ne veut pas voir, est qu’une part croissante des musulmans français se constitue en communauté dissidente rejetant les valeurs républicaines. Elle bénéficie d’un dynamisme démographique qui va rendre le problème majeur d’ici dix ans. C’est dur à admettre mais c’est ainsi. Il suffit de lire les témoignages recueillis par l’historien et enseignant Georges Bensoussan dans les banlieues. Tel est le terreau de la radicalisation. Les tueurs de Daech en sont directement issus.
Q : On a vu après Charlie Hebdo que la simple évocation -ou l’incantation- des valeurs de la République ne rassemblaient pas nécessairement toute la société française, au-delà du deuil et de l’émotion, quelles sont les valeurs qui peuvent vraiment, efficacement rassembler la nation ?
R : D’abord, sans vouloir sombrer dans un post-marxisme mécaniste, il est probable que les choses iraient mieux si nous retrouvions la croissance économique. Certains égarés qui envisagent le djihad trouveraient du travail puis le sain chemin des bars et des boîtes de nuit. Hélas, comme je l’ai écrit vainement depuis des années, il faudrait pour cela plus de libéralisme en interne et plus de souveraineté vis-à-vis de Bruxelles : un cocktail étonnant mais seul à même de nous redonner du tonus. Ensuite, il faudrait réaffirmer sans complexe les valeurs républicaines. Je n’y croyais pas au départ, mais le salut aux couleurs le matin dans les lycées et les collèges serait une bonne chose. Il faut que les jeunes soient fiers d’être français. Ils ont besoin de ressentir des émotions collectives.
Q : Assistons-nous à l’apparition de quelque chose de nouveau dans le discours politique avec des propos radicaux comme ceux de Philippe de Villiers qui dès vendredi soir parlait de mosquéisation de la France ou Laurent Wauquiez qui demande l’internement des 4000 personnes signalées dans les fichiers anti-terroristes ? S’agit-il de dérapages ou d’une stratégie assumée de personnes évoluant dans la galaxie de Patrick Buisson, “Vous cherchez la guerre civile, vous l’aurez (là où la société française dans son ensemble est plutôt résiliente)”, le sous entendu étant nous n’avons pas peur d’avoir à en passer par la violence pour se débarrasser du cancer islamiste?
R : Il ne faut pas s’étonner que la radicalisation entraîne la radicalisation, elle est faite pour cela. Cela étant, le Daechistan bien de chez nous, qui joue la politique du pire, commet une grosse erreur. Pour le moment, les Français sont encore léthargiques pour avoir trop consommé l’opium des intellectuels de gauche. Mais l’islam est et restera un corpus idéologique et une pratique sociale très minoritaire et rejetée par une part écrasante des Français. Or, il est de la nature des parts écrasantes de finir par écraser celles qui ne le sont pas quand ces dernières deviennent des gros problèmes.
Q : Quel est le risque de voir apparaître des gens misant sur la politique du pire pour déclencher une crise violente qui permettrait de précipiter le régime autoritaire qu’ils se cachent à peine de souhaiter (cf livre de Villiers) ?
R : Le risque est réel en effet. La France n’a ni la compacité géographique ni l’homogénéité sociale d’Israël. Face à des attentats récurrents, massifs et imprévisibles, elle finira par réagir plus violemment et indistinctement que ne le fait l’Etat hébreu. Cela ne passerait pas forcément du reste par un Etat autoritaire. La triste réalité d’une situation hors de contrôle ressemblerait plutôt à celle de la Saint Barthélémy : des massacres perpétrés avec la bienveillance du pouvoir par des groupes se réclamant de l’auto-défense.