1 - Ils le connaissent si bien
Avant même son élection à la présidence de la République, François Hollande avait eu droit à un florilège de vacheries entre camarades. A ceux qui les auraient oubliées rappelons au hasard : « L'une des caractéristiques de François Hollande, c'est de considérer que le mensonge est une pratique normale en politique ... » selon Claude Allègre ; « Le point faible de François Hollande, c'est l'inaction. Les Français peuvent-ils citer une seule chose qu'il aurait réalisée en 30 ans de vie politique ? » pour Ségolène Royal en septembre 2011 ; « Hollande, c'est le premier secrétaire qui a tout raté... Le Hollandisme n'existe pas ... » dixit Pierre Moscovici ; « Je n'ai pas oublié que François Hollande a immobilisé le Parti pendant 10 ans. Comment peut-il aspirer à diriger la France ? » du clairvoyant Arnaud Montebourg ou encore le terrible « Entre Ségolène et lui, je la préfère, elle. Au moins, elle dit des choses. Lui profite du vide. » asséné par Martine Aubry.
Les Français auraient dû prêter plus d’attention à toutes ces mises en garde !
François Hollande à l’Elysée, la peur des représailles et l’appât des maroquins fit taire les critiques intestines. Mais elles se font désormais jour avec peu de retenue et il faut saluer cette semaine la véritable leçon de décryptage mou-présidentiel donnée par Gaëtan Gorce, sénateur socialiste de la Nièvre.
Le facétieux nivernais n’y va pas par quatre chemins : «Le pacte de responsabilité n’a d’autre objet que de pérenniser sous une forme différente le CICE (crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi) mis en place voici plus d’un an sans exigence de réciprocité à l’égard du patronat. Le président n’a ni les moyens, ni plus encore la volonté de dégager 50 milliards d’économies supplémentaires. Social-démocrate, le président appartient toujours à la gauche et n’a nullement l’intention d’infliger au pays une diète supplémentaire. Le voudrait-il, il sait que celui-ci ne le supporterait pas. Il s’agit donc d’un leurre visant à enfumer la Commission avec laquelle la France a rendez-vous en avril.» Fouchtra ! Je sens que je vais finir par demander des droits d’auteur sur cette fumigation élyséenne, expression désormais communément répandue.
Voilà en tout cas, en deux ou trois phrases, réglé le compte des dernières annonces présidentielles. Merci à Gorce qui nous évite d’avoir à reprendre les analyses que nous développons d’une semaine sur l’autre. Bien évidemment non, les soi-disant économies destinées à financer la baisse des charges des entreprises ne seront pas au rendez-vous. C’est pour la galerie que les ministres prennent des mines patibulaires lorsqu’ils sortent de Bercy. Il n’y a donc que deux conclusions possibles : soit ce soutien aux entreprises ne verra pas le jour, soit le déficit budgétaire augmentera.
Ce qu’il y a de terrible avec François Hollande, c’est que la réalité sera le cumul des deux hypothèses pessimistes. Le trou dans les finances publiques va s’aggraver sans même que le gouvernement ait le temps et les moyens d’alléger le fardeau des entrepreneurs. Pourquoi ?
Sa tétanie face à Merkel et Draghi, son incapacité à réformer le secteur public par couardise clientéliste et sa fragilité politique croissante empêchent François Hollande d’agir sur les seuls leviers qui permettraient de relancer l’activité : la baisse de l’euro, celle du coût du travail et celle des impôts. Cette triple action est nécessaire et devrait être concomitante. En effet, s’il n’est pas mis un terme à la surévaluation de l’euro, les efforts entrepris par ailleurs seront vains et libèreront des forces déflationnistes.
On ne sait plus comment le faire comprendre à une classe dirigeante qui a remis son destin entre les mains de l’euro depuis plus de quinze ans, quand les parités entre monnaies européennes furent scellées avant même la mise en circulation de la monnaie unique. Depuis, la croissance se traîne en Europe, notamment dans les pays dits du Sud.
En tout cas, il suffit de voir comment le «pouvoir» souille sa culotte à l’idée de mettre fin aux avantages des intermittents du spectacle ou de toucher au monopole des taxis parisiens pour avoir un aperçu de son incapacité radicale à entamer des réformes plus lourdes, comme celles des collectivités locales, du secteur de la santé ou des entreprises publiques.
Gorce a raison : Hollande ne fera que brasser du vent. Mais Gorce nous enfume lui aussi ! Nul ne peut imaginer en effet une seule seconde que la Commission européenne puisse être dupe de ce manège. Ce qui sauve encore temporairement Sa Normalité, c’est que les eurocrates ont intérêt à faire semblant de le croire. Le premier qui engagera le bras de fer dont surgira l’effondrement de l’euro risque d’en porter la responsabilité aux yeux d’une opinion européenne qui n’est pourtant qu’un tigre de papier, un mythe plus qu’une réalité.
2 - L’homme qui se prenait pour le centre de l’Afrique
Rappelons-nous un autre des multiples «engagements» présidentiels : En décembre 2013, lors du déclenchement de l’opération «Sangaris» en Centrafrique, François Hollande avait à assuré que le chiffre de 1 600 hommes ne serait en aucun cas dépassé : «Il n'y en aura pas davantage, cela suffira.» Hélas, nos troupes débordées par les milices en tout genre et face au déchaînement des exactions sur place, non seulement ce chiffre de 1 600 a été vite atteint, mais la France a décidé d’envoyer 400 hommes supplémentaires cette semaine.
Le grand stratège qui nous préside et qui voit plus clair que chacun sur le continent noir, depuis qu’il passa au Mali le «plus beau jour de sa vie politique», s’est donc fourvoyé. Une fois encore !
Le compteur du coût des opérations extérieures va donc tourner de plus belle. Mais cela ne pose aucun problème pour un pays aussi prospère que la France aujourd’hui.
3 - Libé, le lumbago Hidalgo
A ceux qui pourraient encore s’interroger sur la raison du désintérêt profond des amateurs d’information pour ce qui peut être publié dans Libération, un article mi-panégyrique mi publireportage sur la merveilleuse dauphine que Delanoë a donné aux Parisiens vient ôter tout questionnement. «La longue marche d’Hidalgo la discrète» lit on dans ce rappel des merveilleuses qualités d’opiniâtreté et de travail de cette élue exceptionnelle.
Les lecteurs de Libération qui chercheront la moindre information sur le départ à la retraite à 51 ans de l’intéressée, les dix années mystérieuses qu’elle passa à l’inspection du travail entre 2001 et 2011, les raisons inexpliquées de sa fulgurante carrière quand elle évinça sans coup férir le secrétaire de la section du PS dans le quinzième arrondissement ou des concurrentes et concurrents pourtant bien plus titrés à la tête de liste socialiste aux régionales en 2004 resteront sur leur faim.
Les lecteurs s’enfuient mais ce n’est pas grave, les subventions les remplaceront. Il faut aider les intermittents de l’information.