Le Canard enchaîné a eu beau jeu de vitupérer le livre en question. La contre-attaque était facile. Passées quelques « révélations » sur la soi-disant complaisance, pour ne pas dire la complicité, entre l’entourage de Sarkozy et la rédaction du Canard, les deux enquêteurs se bornent en effet pour l’essentiel à compiler le travail d’un universitaire : Laurent Martin, auteur d’une thèse sur le sujet, les déclarations d’anciens collaborateurs en bisbille avec leur ex-employeur et quelques témoignages éventés. Bref, sur le plan factuel, ce livre ne nous apprend que peu de choses. Or, pour critiquer utilement le Canard, il eût fallu a minima retourner contre lui les armes qu’il utilise contre les autres, à savoir l’exclusivité d’informations le mettant en porte-à-faux avec son discours officiel.
Revenons donc rapidement sur la prétendue mansuétude canardesque à l’égard de Sarkozy. S’il est une chose singulière et plaisante, depuis deux ou trois ans, c’est de voir ledit Sarkozy accusé d’une sorte de contrôle orwellien sur la presse écrite ou audiovisuelle française alors qu’il ne faut pas beaucoup de mémoire pour se souvenir de la complaisance infiniment supérieure des journaux et télévisions avec tous les prédécesseurs de l’actuel chef de l’Etat. Le Canard n’échappe guère à la règle et a maintes fois donné du bec contre l’ex-maire de Neuilly. Apprendre que le journal de Carla serait coécrit par Pierre Charon, conseiller à l'Elysée, quand bien même ce serait exact, relève en vérité de l’anecdote étant donné le caractère ludique de cette rubrique. Ce qui compte, ce sont les pages dédiées aux infos « confidentielles » et elles attaquent ou raillent fréquemment l'actuel président.
Une fois passées ces révélations de peu d’intérêt, le livre de Valdiguié décrit un mode de fonctionnement que chacun pouvait deviner : une ambiance de moines-soldats, une tendance à la parano collective, inévitable au vu du type d’activité exercée et d’ailleurs parfois justifiée par des complots pas du tout imaginaires (c.f. affaire des micros) et les loupés que provoquent tout aussi inévitablement la recherche permanente du scoop (c.f. affaire Yann Piat).
Beaucoup plus gênante pour le Canard, et mieux cernée par les auteurs du livre, est la tendance au « deux poids-deux mesures ». La démonstration, sinon de la partialité, du moins de l’acharnement sélectif selon que les scandales réels ou présumés touchaient l’entourage de Mitterrand ou celui des présidents de droite, est assez solidement étayée, n’en déplaise au palmipède, par le rappel de la prudente circonspection de l’hebdomadaire avec tout ce qui touchait de près ou de loin à Tonton et à ses diadoques.
Apparaît alors assez clairement l’influence de deux rédacteurs : Nicolas Brimo et Claude Angeli, passés dans leur jeunesse par la presse officielle du PS et du PC. Ce dernier se distinguant en outre par un anti-américanisme obsessionnel en fait de politique étrangère. Sa spécialité semble être de colporter le moindre télégrammicule du Quai d’Orsay prédisant l’embrasement universel à chaque envoi de G.I. en Irak ou en Afghanistan.
D’où il ressort que, pour conserver intacte sa verve et sa corrosion, le Canard devrait se forcer, même s’il lui en coûte, à recruter un peu plus de journalistes de droite, histoire de donner des coups de bec des deux côtés de la mare. Pour la liberté de la presse et l’indépendance d’esprit, l’anarchisme, il n’y a que ça de vrai ! A défaut, le pluralisme a quelque vertu.
Un dernier mot sur le Canard et Paris. Le livre reprend abondamment la dénonciation des turpitudes prêtées à Chirac et à son entourage. Fort bien. Delanoë, personnage de moindre envergure que son anté-prédécesseur - inutile de protester c’est un fait objectif au regard des fonctions exercées ! -, n’est certes pas l’objet du même acharnement. Mais il a eu droit lui-aussi à des attaques assez méchantes depuis qu’il lui a pris de s’imaginer un destin national. En revanche, les enquêtes sur le fonctionnement de la municipalité elle-même sont rares et plutôt bonnasses. Ainsi, sur la tour Toblerone, les relations entre la mairie et Unibail sont présentées comme difficiles. Il suffit pourtant, pour en douter, de constater que le maire et ses adjoints ont multiplié les conférences de presse communes avec les dirigeants de ce groupe, comportement singulier et inhabituel, et qu’ils ont tramé dans l’ombre leur projet pendant des mois. Sur les liens de Delanoë et Guazzini et l’investissement considérable que la ville entend faire à Jean Bouin, sur l’affaire Flam, sur les relations avec Decaux ou avec l’agence de com’ Anatome, sur les Halles, sur les sommes englouties pour les J.O. ou les aménagements de voirie, sur le Racing, etc., l’hebdomadaire est peu disert.
Mais soyons optimistes et prenons patience, le Canard finira bien par caqueter de ce côté-là. Les ornithologues vous le diront, cet oiseau aime à voler droit. Et la rue de Rivoli mène directement à l’Hôtel de ville, non ?
Revenons donc rapidement sur la prétendue mansuétude canardesque à l’égard de Sarkozy. S’il est une chose singulière et plaisante, depuis deux ou trois ans, c’est de voir ledit Sarkozy accusé d’une sorte de contrôle orwellien sur la presse écrite ou audiovisuelle française alors qu’il ne faut pas beaucoup de mémoire pour se souvenir de la complaisance infiniment supérieure des journaux et télévisions avec tous les prédécesseurs de l’actuel chef de l’Etat. Le Canard n’échappe guère à la règle et a maintes fois donné du bec contre l’ex-maire de Neuilly. Apprendre que le journal de Carla serait coécrit par Pierre Charon, conseiller à l'Elysée, quand bien même ce serait exact, relève en vérité de l’anecdote étant donné le caractère ludique de cette rubrique. Ce qui compte, ce sont les pages dédiées aux infos « confidentielles » et elles attaquent ou raillent fréquemment l'actuel président.
Une fois passées ces révélations de peu d’intérêt, le livre de Valdiguié décrit un mode de fonctionnement que chacun pouvait deviner : une ambiance de moines-soldats, une tendance à la parano collective, inévitable au vu du type d’activité exercée et d’ailleurs parfois justifiée par des complots pas du tout imaginaires (c.f. affaire des micros) et les loupés que provoquent tout aussi inévitablement la recherche permanente du scoop (c.f. affaire Yann Piat).
Beaucoup plus gênante pour le Canard, et mieux cernée par les auteurs du livre, est la tendance au « deux poids-deux mesures ». La démonstration, sinon de la partialité, du moins de l’acharnement sélectif selon que les scandales réels ou présumés touchaient l’entourage de Mitterrand ou celui des présidents de droite, est assez solidement étayée, n’en déplaise au palmipède, par le rappel de la prudente circonspection de l’hebdomadaire avec tout ce qui touchait de près ou de loin à Tonton et à ses diadoques.
Apparaît alors assez clairement l’influence de deux rédacteurs : Nicolas Brimo et Claude Angeli, passés dans leur jeunesse par la presse officielle du PS et du PC. Ce dernier se distinguant en outre par un anti-américanisme obsessionnel en fait de politique étrangère. Sa spécialité semble être de colporter le moindre télégrammicule du Quai d’Orsay prédisant l’embrasement universel à chaque envoi de G.I. en Irak ou en Afghanistan.
D’où il ressort que, pour conserver intacte sa verve et sa corrosion, le Canard devrait se forcer, même s’il lui en coûte, à recruter un peu plus de journalistes de droite, histoire de donner des coups de bec des deux côtés de la mare. Pour la liberté de la presse et l’indépendance d’esprit, l’anarchisme, il n’y a que ça de vrai ! A défaut, le pluralisme a quelque vertu.
Un dernier mot sur le Canard et Paris. Le livre reprend abondamment la dénonciation des turpitudes prêtées à Chirac et à son entourage. Fort bien. Delanoë, personnage de moindre envergure que son anté-prédécesseur - inutile de protester c’est un fait objectif au regard des fonctions exercées ! -, n’est certes pas l’objet du même acharnement. Mais il a eu droit lui-aussi à des attaques assez méchantes depuis qu’il lui a pris de s’imaginer un destin national. En revanche, les enquêtes sur le fonctionnement de la municipalité elle-même sont rares et plutôt bonnasses. Ainsi, sur la tour Toblerone, les relations entre la mairie et Unibail sont présentées comme difficiles. Il suffit pourtant, pour en douter, de constater que le maire et ses adjoints ont multiplié les conférences de presse communes avec les dirigeants de ce groupe, comportement singulier et inhabituel, et qu’ils ont tramé dans l’ombre leur projet pendant des mois. Sur les liens de Delanoë et Guazzini et l’investissement considérable que la ville entend faire à Jean Bouin, sur l’affaire Flam, sur les relations avec Decaux ou avec l’agence de com’ Anatome, sur les Halles, sur les sommes englouties pour les J.O. ou les aménagements de voirie, sur le Racing, etc., l’hebdomadaire est peu disert.
Mais soyons optimistes et prenons patience, le Canard finira bien par caqueter de ce côté-là. Les ornithologues vous le diront, cet oiseau aime à voler droit. Et la rue de Rivoli mène directement à l’Hôtel de ville, non ?