D’abord, la rétrospective Ron Arad. A 57 ans, le designer israélo-londonien démontre, s’il en était besoin, qu’il trône au sommet de sa profession. Son talent est éclatant. Les torsions qu’il impose à son mobilier évoquent la simplicité organique de galets roulés par la mer autant qu’elles révèlent la sophistication d’images travaillées par ordinateur. Sa maîtrise de l’outil informatique au service d’un lyrisme dépouillé est d’ailleurs impressionnante. On retrouve les courbes de Hans Arp ou d’Alexandre Noll, ou celles du mobilier italien des années 50. C’est une véritable synthèse de styles mais également une totale liberté dans l’usage des matériaux. Fer, acier, plastiques en tous genres, résilles, bois même : tout y passe. Là aussi les références abondent, comme celle au très regretté Ettore Sottsass pour ses mélanges de couleur. Et l’humour est souvent présent, avec les chaînes stéréo en béton, les skis de rocking-chairs sous les fauteuils en plastique ou encore les cubes intégrés en polyuréthane à désemboiter pour obtenir un entier mobilier de salon.
On découvre également quelques réalisations et projets architecturaux de grande qualité, décors d’hôtels et d’appartements mais désormais aussi musées et centres commerciaux. Et l’on se prend à rêver d’une réalisation significative d’Arad à Paris ; de ce qu’un tel talent, avec d’autres, aurait pu faire aux Halles, dans le cadre du projet de Rem Koolhaas et des différentes émergences qu’il suggérait d’y construire.
Mais revenons à la dure réalité de la médiocrité architecturale parisienne et contentons-nous de saluer en Ron Arad l’un des artistes les plus intéressants de notre époque en allant admirer ses créations.
A côté de l’exposition Arad, dans le petit espace 315, une divine surprise : l’installation d’un mexicain dont nous ignorions tout, Damian Ortega. Dès qu’on pénètre dans la salle, on est happé par la poétique beauté de ses suspensions polychromes en forme de rideaux qui créent un espace hors norme, où les visiteurs qui avancent paraissent en lévitation quand on les observe. Mais cela n’est encore rien à côté de ce que l’on découvre en passant de l’autre côté du miroir, comme nous y incite l’artiste. Un formidable clin d’œil, une trouvaille extraordinaire. Je ne vous dis rien de plus car l’effet de surprise doit rester entier. Mais, à ce niveau de sophistication visuelle, on touche à la réflexion philosophique et même au génie, mot qu’il faut pourtant éviter de galvauder. Bref, un délice.
Troisième bonne surprise, l’exposition sur le futurisme, même si elle a eu mauvaise presse. Nous n’entrerons pas dans les détails mais il faut savoir que les tableaux futuristes sont rares à Paris et que l’effort de reconstitution de l’exposition de 1912 chez Bernheim-Jeune est déjà suffisant pour valoir le détour. En fait, ce qui déçoit dans cet utile rappel c’est la relative pauvreté des explications données sur les parcours et les apports respectifs de Balla, Boccioni, Carrà ou Severini. Mais la glorification provocatrice de la vitesse, de l’énergie, de la métropole et du renversement de l’équilibre et du bon goût est salutaire, dans notre triste époque, fade et timorée. Certains devraient méditer, au passage, l’éloge esthétique de l’automobile fait par Severini, cela leur ferait du bien au mental, comme on dit désormais.
Signalons aussi, au cœur de cette exposition, la très séduisante vidéo de Jeff Mills, sur une musique qu’il a composée lui-même, en hommage au Metropolis de Lang.
Enfin, un grand coup de chapeau à Daniel Cordier, qui enrichit à nouveau les collections nationales par des objets exposés au troisième étage du musée. Il s’agit moins, contrairement à ses fabuleuses donations des années 70 et 80, de tableaux d’artistes européens que d’objets d’art primitif, de concrétions naturelles présentées savamment, de bois érodés. Leur apparente modestie n’ôte rien à leur intérêt plastique. Ce résistant authentique, ancien plus proche collaborateur de Jean Moulin, ce galeriste avant-gardiste, ce grand donateur des musées nationaux sans qui Réquichot ou Dado seraient à peine représentés dans les collections publiques, mériterait une reconnaissance du pays infiniment supérieure à celle qu’on lui accorde et qu’il a la sagesse et la modestie de ne pas attendre.
Mais, que voulez-vous, nous sommes en France. Pour le meilleur et pour le pire. En ce moment, Beaubourg nous montre le meilleur.
On découvre également quelques réalisations et projets architecturaux de grande qualité, décors d’hôtels et d’appartements mais désormais aussi musées et centres commerciaux. Et l’on se prend à rêver d’une réalisation significative d’Arad à Paris ; de ce qu’un tel talent, avec d’autres, aurait pu faire aux Halles, dans le cadre du projet de Rem Koolhaas et des différentes émergences qu’il suggérait d’y construire.
Mais revenons à la dure réalité de la médiocrité architecturale parisienne et contentons-nous de saluer en Ron Arad l’un des artistes les plus intéressants de notre époque en allant admirer ses créations.
A côté de l’exposition Arad, dans le petit espace 315, une divine surprise : l’installation d’un mexicain dont nous ignorions tout, Damian Ortega. Dès qu’on pénètre dans la salle, on est happé par la poétique beauté de ses suspensions polychromes en forme de rideaux qui créent un espace hors norme, où les visiteurs qui avancent paraissent en lévitation quand on les observe. Mais cela n’est encore rien à côté de ce que l’on découvre en passant de l’autre côté du miroir, comme nous y incite l’artiste. Un formidable clin d’œil, une trouvaille extraordinaire. Je ne vous dis rien de plus car l’effet de surprise doit rester entier. Mais, à ce niveau de sophistication visuelle, on touche à la réflexion philosophique et même au génie, mot qu’il faut pourtant éviter de galvauder. Bref, un délice.
Troisième bonne surprise, l’exposition sur le futurisme, même si elle a eu mauvaise presse. Nous n’entrerons pas dans les détails mais il faut savoir que les tableaux futuristes sont rares à Paris et que l’effort de reconstitution de l’exposition de 1912 chez Bernheim-Jeune est déjà suffisant pour valoir le détour. En fait, ce qui déçoit dans cet utile rappel c’est la relative pauvreté des explications données sur les parcours et les apports respectifs de Balla, Boccioni, Carrà ou Severini. Mais la glorification provocatrice de la vitesse, de l’énergie, de la métropole et du renversement de l’équilibre et du bon goût est salutaire, dans notre triste époque, fade et timorée. Certains devraient méditer, au passage, l’éloge esthétique de l’automobile fait par Severini, cela leur ferait du bien au mental, comme on dit désormais.
Signalons aussi, au cœur de cette exposition, la très séduisante vidéo de Jeff Mills, sur une musique qu’il a composée lui-même, en hommage au Metropolis de Lang.
Enfin, un grand coup de chapeau à Daniel Cordier, qui enrichit à nouveau les collections nationales par des objets exposés au troisième étage du musée. Il s’agit moins, contrairement à ses fabuleuses donations des années 70 et 80, de tableaux d’artistes européens que d’objets d’art primitif, de concrétions naturelles présentées savamment, de bois érodés. Leur apparente modestie n’ôte rien à leur intérêt plastique. Ce résistant authentique, ancien plus proche collaborateur de Jean Moulin, ce galeriste avant-gardiste, ce grand donateur des musées nationaux sans qui Réquichot ou Dado seraient à peine représentés dans les collections publiques, mériterait une reconnaissance du pays infiniment supérieure à celle qu’on lui accorde et qu’il a la sagesse et la modestie de ne pas attendre.
Mais, que voulez-vous, nous sommes en France. Pour le meilleur et pour le pire. En ce moment, Beaubourg nous montre le meilleur.