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Être libéral et favorable à l’interdiction du voile dans les universités peut sembler paradoxal. J’entends déjà mes détracteurs : "Comment ? Mais les femmes qui vont voilées dans ces établissements sont des adultes, cher ami ! Elles ont le droit de faire un choix, elles sont libres. Au nom de quoi les en empêcher ? N’est-ce pas de la laïcité punitive, comme le disent Jean-Louis Bianco et son Observatoire sur le sujet ; de l’islamophobie, donc du racisme?"
Et bien non, messieurs les faux laïcs, votre sophisme n’est que reductio ad lepenum.
Sur un sujet aussi sensible et qui va s’inviter de plus en plus durement dans le débat public, il faut en effet raisonner avec rigueur. Le voile ne concerne pas uniquement celles qui le portent, c’est là tout le problème.
Ceux qui fréquentent l’université, comme les autres lieux d’éducation ou comme l’hôpital, entrent nécessairement, par nature et par usage, en contact les uns avec les autres et doivent communiquer entre eux. Un élève parle aux autres élèves et à ses professeurs, un malade à ses soignants, des patients occupent parfois les mêmes chambres, etc. Ils n’ont pas le libre choix de leurs relations, la possibilité de les éviter s’ils le souhaitent. Le principe de la laïcité est alors simple : dans ce type d’endroits, pour que les convictions de chacun soient respectées, nul ne doit arborer de signes extérieurs de ralliement à une foi, une croyance, un parti, un syndicat, etc.
Aller dans l'amphithéâtre d'une université pour suivre ou donner un cours et devoir côtoyer, questionner ou entreprendre des travaux dirigés avec quelqu’un qui porterait un maillot orné de la rose socialiste ou du logo de l’UMP pourrait légitimement heurter ceux qui ne sont pas leurs partisans. Ce qui vaut pour le politique au sens strict vaut aussi pour le religieux.
Ceux qui sont gênés par le spectacle d’une femme voilée, qu’ils jugent sexiste et régressif, doivent voir leurs convictions préservées dans l'espace même où ils ne peuvent se soustraire à sa présence et éviter d’entrer en relation avec elle. La liberté d’expression ne concerne pas que ceux qui s’expriment, elle doit être conciliée avec les droits de ceux qui sont nécessairement confrontés à cette expression.
Car le port du voile est un acte qui ne relève pas de la seule foi abstraite et personnelle mais de l’adhésion au principe que la femme doit se vêtir avec modestie pour ne pas attiser le désir masculin. "Dis aux croyantes de baisser leurs regards, d’être chastes, de ne montrer de leurs atours que ce qui en paraît. Qu’elles rabattent leurs voiles sur leurs poitrines ! Qu’elles montrent seulement leurs atours à leurs époux, ou à leurs pères ... ou à leurs frères.." (Coran, XXIV,31) On remarquera qu’il est question de poitrine et non de cheveux et que la lecture rigoriste du Coran est une surinterprétation donnée par des dévots pudibonds. La Turquie d’Ataturk a interdit le port du voile en 1925 en même temps que la polygamie. L’Iran lui emboîta le pas une dizaine d’années plus tard avant malheureusement que le régime des mollahs ne mît fin à cette libéralisation.
Il s’agit donc de savoir si, à l’université ou à l’hôpital, nous laisserons s’imposer une orientation proprement politique dans l’interprétation du Coran, celle qu’en font des rétrogrades. Elle infantilise également l'homme, jugé incapable de résister aux pulsions que suscite une femme aguicheuse et coupable par essence.
Du reste, cette question n’est pas propre à l’islam puisque Saint Paul dans son épître aux Corinthiens suggère que, pendant la prière : " L’homme ne doit pas se couvrir la tête, parce qu’il est l’image de la gloire de dieu, tandis que la femme est la gloire de l’homme et l’homme n’a pas été créé pour la femme mais la femme pour l’homme ... C’est pourquoi la femme doit, à cause des anges, avoir sur la tête un signe de sujétion."
Le combat contre le sexisme et la pudibonderie dépasse donc le seul islam même si aujourd’hui ce dernier en est le plus virulent vecteur. On notera enfin que, voile ou pas voile, les femmes peuvent se faire agresser exactement de la même manière, comme ce fut observé en Egypte lors des troubles qui mirent fin au pouvoir des Frères musulmans il y a deux ans.
Il nous appartient donc, appuyés sur les principes de la laïcité, de favoriser une lecture modérée plutôt que fondamentaliste du Coran, compatible avec l’esprit de la République. En 1897, le réformiste égyptien Qâsim Amîn publia un ouvrage essentiel : "Tahrîr al-mar’a" ou "Libération de la femme" qui affirmait l’égalité entre les sexes contre une interprétation selon lui erronée du Coran. Il prônait l’éducation des femmes et leur recommandait d’abandonner le voile. Mais, on l'a constaté désormais, instruction n’est pas synonyme d'émancipation. Le retour du voile à l’université est même le symbole du contraire.
L’y laisser prospérer, comme le font actuellement par lâcheté ou mauvaise compréhension des termes du débat une grande partie des politiques, est très périlleux. Le jour viendra plus vite qu’on l’imagine où le nombre de femmes voilées alimentera une revendication pour des bancs ou des amphithéâtres séparés, puis une ségrégation des enseignants par genre et enfin une contestation du contenu même des enseignements. La démission actuelle est la voie ouverte à un conflit beaucoup plus dur dans quelques années.
Comme l’écrivait élégamment Abu Shakour, poète persan du 10ème siècle : "Quand l’arbre est petit, le jardinier peut encore le manipuler mais quand il est grand, il ne pourra plus le redresser".
Et bien non, messieurs les faux laïcs, votre sophisme n’est que reductio ad lepenum.
Sur un sujet aussi sensible et qui va s’inviter de plus en plus durement dans le débat public, il faut en effet raisonner avec rigueur. Le voile ne concerne pas uniquement celles qui le portent, c’est là tout le problème.
Ceux qui fréquentent l’université, comme les autres lieux d’éducation ou comme l’hôpital, entrent nécessairement, par nature et par usage, en contact les uns avec les autres et doivent communiquer entre eux. Un élève parle aux autres élèves et à ses professeurs, un malade à ses soignants, des patients occupent parfois les mêmes chambres, etc. Ils n’ont pas le libre choix de leurs relations, la possibilité de les éviter s’ils le souhaitent. Le principe de la laïcité est alors simple : dans ce type d’endroits, pour que les convictions de chacun soient respectées, nul ne doit arborer de signes extérieurs de ralliement à une foi, une croyance, un parti, un syndicat, etc.
Aller dans l'amphithéâtre d'une université pour suivre ou donner un cours et devoir côtoyer, questionner ou entreprendre des travaux dirigés avec quelqu’un qui porterait un maillot orné de la rose socialiste ou du logo de l’UMP pourrait légitimement heurter ceux qui ne sont pas leurs partisans. Ce qui vaut pour le politique au sens strict vaut aussi pour le religieux.
Ceux qui sont gênés par le spectacle d’une femme voilée, qu’ils jugent sexiste et régressif, doivent voir leurs convictions préservées dans l'espace même où ils ne peuvent se soustraire à sa présence et éviter d’entrer en relation avec elle. La liberté d’expression ne concerne pas que ceux qui s’expriment, elle doit être conciliée avec les droits de ceux qui sont nécessairement confrontés à cette expression.
Car le port du voile est un acte qui ne relève pas de la seule foi abstraite et personnelle mais de l’adhésion au principe que la femme doit se vêtir avec modestie pour ne pas attiser le désir masculin. "Dis aux croyantes de baisser leurs regards, d’être chastes, de ne montrer de leurs atours que ce qui en paraît. Qu’elles rabattent leurs voiles sur leurs poitrines ! Qu’elles montrent seulement leurs atours à leurs époux, ou à leurs pères ... ou à leurs frères.." (Coran, XXIV,31) On remarquera qu’il est question de poitrine et non de cheveux et que la lecture rigoriste du Coran est une surinterprétation donnée par des dévots pudibonds. La Turquie d’Ataturk a interdit le port du voile en 1925 en même temps que la polygamie. L’Iran lui emboîta le pas une dizaine d’années plus tard avant malheureusement que le régime des mollahs ne mît fin à cette libéralisation.
Il s’agit donc de savoir si, à l’université ou à l’hôpital, nous laisserons s’imposer une orientation proprement politique dans l’interprétation du Coran, celle qu’en font des rétrogrades. Elle infantilise également l'homme, jugé incapable de résister aux pulsions que suscite une femme aguicheuse et coupable par essence.
Du reste, cette question n’est pas propre à l’islam puisque Saint Paul dans son épître aux Corinthiens suggère que, pendant la prière : " L’homme ne doit pas se couvrir la tête, parce qu’il est l’image de la gloire de dieu, tandis que la femme est la gloire de l’homme et l’homme n’a pas été créé pour la femme mais la femme pour l’homme ... C’est pourquoi la femme doit, à cause des anges, avoir sur la tête un signe de sujétion."
Le combat contre le sexisme et la pudibonderie dépasse donc le seul islam même si aujourd’hui ce dernier en est le plus virulent vecteur. On notera enfin que, voile ou pas voile, les femmes peuvent se faire agresser exactement de la même manière, comme ce fut observé en Egypte lors des troubles qui mirent fin au pouvoir des Frères musulmans il y a deux ans.
Il nous appartient donc, appuyés sur les principes de la laïcité, de favoriser une lecture modérée plutôt que fondamentaliste du Coran, compatible avec l’esprit de la République. En 1897, le réformiste égyptien Qâsim Amîn publia un ouvrage essentiel : "Tahrîr al-mar’a" ou "Libération de la femme" qui affirmait l’égalité entre les sexes contre une interprétation selon lui erronée du Coran. Il prônait l’éducation des femmes et leur recommandait d’abandonner le voile. Mais, on l'a constaté désormais, instruction n’est pas synonyme d'émancipation. Le retour du voile à l’université est même le symbole du contraire.
L’y laisser prospérer, comme le font actuellement par lâcheté ou mauvaise compréhension des termes du débat une grande partie des politiques, est très périlleux. Le jour viendra plus vite qu’on l’imagine où le nombre de femmes voilées alimentera une revendication pour des bancs ou des amphithéâtres séparés, puis une ségrégation des enseignants par genre et enfin une contestation du contenu même des enseignements. La démission actuelle est la voie ouverte à un conflit beaucoup plus dur dans quelques années.
Comme l’écrivait élégamment Abu Shakour, poète persan du 10ème siècle : "Quand l’arbre est petit, le jardinier peut encore le manipuler mais quand il est grand, il ne pourra plus le redresser".